Claudia Cardinale est avec Jacqueline Bisset une des dernières stars de cinéma à avoir connu l’époque de « l’ancien système ». Celle des contrats à longue durées et de la starification à long terme des actrices. Elle a commencé sa carrière quand on fabriquait encore des stars.
Quand la presse spécialisée commentait tous les faits et gestes des icônes de celluloïd comme Bardot, Loren, Lollobrigida, ses prestigieuses aînées. Une époque crépusculaire et malgré tout bénie pour un cinéma enfin débarrassé de la censure et des limites techniques trop contraignantes. Hollywood était encore Hollywood, le cinéma Italien était à son apogée et Claudia belle à couper le souffle. Elle allait tourner avec les derniers géants du cinéma dont Burt Lancaster, Rock Hudson, John Wayne, David Niven, Anthony Quinn…entre autres.
Et puis le cinéma changera.
Claudia est Italienne mais vient à monde à Tunis le 15 Avril 1938.
Son père, Monsieur Cardinale est ingénieur civil aux chemins de fer de Tunis.
Sa maman Yolande Greco est femme au foyer. Quant aux grands parents de Claudia, paternels comme maternels, ils sont tous originaires de Sicile. Etrangement la famille Cardinale ne parle pas italien à la maison. Uniquement le français.
La petite fille est baptisée Claude Joséphine Rose.
Elle a déjà une sœur. Blanche. Bientôt, deux petits frères suivront, Bruno et Adrien.
Son enfance est sans histoires dans une famille très unie pour ne pas dire fusionnelle.
Les Cardinale c’est un vrai clan.
Elle est collégienne lorsqu’une équipe de tournage débarque au collège pour demander des figurantes.
Rien de bien sensationnel. Un documentaire sur les pêcheurs. On a besoin que quelques jeunes filles qu’on ne verra même pas. Elles seront voilées de blanc. Elles sont supposées être les épouses attendant le retour de leurs maris-pêcheurs. Lorsque la caméra balaye le groupe de femmes, un coup de vent léger mais facétieux soulève le voile de Claude qui apparaît dans tout l’éclat de sa juvénile beauté. La caméra se fige, oubliant tout le reste et Claude s’en rendant compte, ne peut pas s’empêcher de rire.
Elle est toujours collégienne lorsque l’on vient une nouvelle fois chercher une jeune fille dans son collège. Cette fois c’est pour un court rôle. Une seule scène. Une scène dans un film avec Omar Sharif. L’acteur remarque Claudia.
« Si cette fille acceptait de venir à Paris elle casserait la baraque ! ».
Il n’en est pas question !
Le cinéma, Claudia n’aime pas ça et puis elle a son petit projet d’avenir bien planté dans sa si jolie tête. On cherche des institutrices pour aller enseigner dans les coins les plus perdus du pays. Aux portes du désert. Et Claudia est vraiment très intéressée.
Mais son destin va basculer. Au cours d’une fête de charité. Claudia est couronnée « plus belle italienne de Tunis ». Ce n’est pas un concours, ça s’est fait comme ça. Presque une plaisanterie.
Mais la plaisanterie mérite un prix. Un voyage à Venise durant le festival du cinéma.
La jeune fille nage dans un bonheur de courte durée. Elle est sauvagement violée le soir même de la fête. Ce soir-là, la vie de Claudia va basculer irrémédiablement et à tout jamais.
La jeune Claudia Cardinale ravale ses larmes et sa souffrance. Elle gagne l’Italie. Elle gagne Venise et son festival où d’autres déceptions, certes moins fâcheuses l’attendent. Claudia découvre qu’en fait, durant les grands festivals de cinéma, si la presse fait grand cas des starlettes et des miss de partout et de n’importe quoi, en réalité, tout le monde s’en fout.
Un délégué du festival est allé l’accueillir à l’aéroport avec l’enthousiasme qu’il aurait mis à aller chercher un paquet. Il lui a donné un bouquet de roses et lorsqu’elle s’est confondue en remerciements il lui a dit l’air tout à fait étonné que c’était le même bouquet pour toutes les invitées. Ce délégué resté inconnu la conduisit ensuite à son hôtel avec l’air de s’acquitter d’une corvée d’une grande pénibilité. Alors qu’il n’adressait ni la parole ni un regard à Claudia, il se souvint soudain qu’il avait à lui montrer le grand canal. Ce qu’il fit d’un laconique « Là, à gauche, c’est le grand canal ».
Sa beauté et sa spontanéité font fureur au Lido. Claudia est émerveillée mais garde les pieds sur terre. Et puis, les mœurs des gens du cinéma qu’elle découvre la heurtent violemment.
Alors qu’elle met un point d’honneur à se conduire « comme une jeune fille très bien », elle assiste effarée au manège des autres starlettes prêtes à toutes les manigances pour obtenir le numéro de chambre de n’importe quel homme pourvu qu’il ait affaire, de près ou de loin, avec le cinéma. Elle participe à un court métrage puis regagne sagement le home familial dès que les lumières de la Mostra s’éteignent.
Lorsqu’elle se promenait dans Venise, les photographes à l’affût d’affriolantes se ruaient sur elle. La jeune fille avait déjà décidé qu’il ne serait pas question de cinéma pour elle.
Au lieu de profiter de l’aubaine en posant pour eux, elle les rembarrait d’un « Laissez-moi tranquille ! Je ne suis pas une actrice, je suis une touriste je suis là en vacances ! »
Ceci en français puisque la belle italienne ne pipe pas un mot d’italien.
Fascinée par les paillettes dorées du cinéma en arrivant à Venise, beaucoup moins en repartant, elle ne compte pas, et moins que jamais, devenir une actrice et encore moins une star.
Elle a rêvé des années à la vie simple d’une petite institutrice pour les enfants de la colonie italienne à Tunis. Après l’épisode vénitien, ça lui semble décidément plus enviable et bien plus digne. Alors Claudia prend sa décision ferme : Elle refuse énergiquement toutes les propositions qui lui sont faites. D’ailleurs elle s’étonne qu’on lui en fasse. Pour elle c’est l’incompréhension.
Elle ne comprend pas que l’on puisse s’intéresser, miser, investir sur elle. Elle ne le comprendra jamais vraiment.
Elle n’a fait que passer au festival de Venise. Et encore. Le moins possible. Lorsque par hasard on la prenait en photo, à son arrivée, elle se sentait si inintéressante qu’elle croyait avoir affaire à des touristes ou des reporters débutants qui n’avaient pas leurs entrées au festival.
Des années plus tard, considérée comme la seule star d’Italie à souffrir la comparaison avec Sophia Loren, elle s’étonnera encore. « Je reçois des milliers de lettres d’admirateurs alors bien sûr que ça me fait plaisir de voir que les gens m’aiment mais d’un autre côté ça me fait tellement de peine pour tous ces gens qui s’imaginent que je suis une merveilleuse princesse alors que je ne suis qu’ne petite bonne femme banale et sans intérêt. »
Au début des années 60, le très illustre Alberto Moravia la contacte et lui demande de caler quelques rendez-vous. Claudia croit qu’il s’agit de préparer un film, une adaptation d’un roman du célèbre écrivain mais non. Moravia, fasciné veut écrire un livre sur elle. Complètement effarée elle déclare « Mais ? Monsieur Moravia, que voulez-vous trouver d’intéressant à écrire sur moi ? Il n’y a rien ! »
Alors qu’elle est déjà une star internationale, une journaliste la happe à l’entrée d’un festival « Claudia, dites-moi, qui vous coiffe ? » Et elle, toujours aussi stupéfaite « Hein ? Mais c’est moi ! »
Mais revenons-en à ses fameux débuts. Certains producteurs sont tellement sûrs d’avoir déniché la perle rare que Claudia se retrouve à l’aéroport de Venise attendant l’avion qui la ramène chez elle et voit débarquer toute une équipe de tournage pour lui faire faire un bout d’essai séance tenante. La réponse reste la même : non ! Mais mademoiselle Claude Cardinale n’est pas au bout de son calvaire. Le viol a porté ses fruits, (si j’ose m’exprimer ainsi !) elle est enceinte.
Au milieu des années 50, dans une famille Italienne vivant en Tunisie être fille mère après un viol ne doit pas précisément être facile à vivre. Même sans viol, d’ailleurs. Une fille mère est une fille perdue et dans tout autre clan que celui des Cardinale, elle aurait été chassée de la famille, de la ville pour finir chez une avorteuse d’arrière cuisine ou dans un bar à matelots des rues basses.
Claudia va mettre au monde un petit garçon dans le plus grand secret. Comme une héroïne bafouée dans un roman de gare. Ni elle ni personne dans sa famille ne sera même effleuré par l’idée d’un avortement. Et Claudia la première va non seulement se faire à l’idée mais attendre son enfant avec une joie immense. Elle devra quitter Tunis le temps de sa grossesse et s’installer chez une de ses tantes dans la banlieue de Rome jusqu’à la naissance du petit Patrick.
Un des producteurs qui l’avait remarquée à Venise est plus têtu que les autres.
Franco Cristaldi renouvelle ses offres. A l’époque, les stars italiennes ont toutes leur « protecteur ». Sophia Loren a Carlo Ponti, Gina Lollobrigida son mari Milko Skofic. Silvana Mangano a Dino de Laurentis et Guiletta Masina Federico Fellini. Alors si toute star italienne a son pygmalion, tout producteur italien doit avoir sa star. Franco Cristaldi est persuadé que Claudia sera sa star.
La presse sera admirative de la ténacité de Claudia qui s’obstine à dire non. Et tout autant de la ténacité de Cristaldi à insister. Peuvent-ils s’imaginer, Cristaldi comme les journalistes que Claudia met son enfant au monde ?
Après un conseil de famille, la jeune fille accepte et signe un contrat.
A deux conditions. Qu’elle ne doive pas se couper les cheveux et surtout, qu’elle soit toujours accompagnée d’un membre de sa famille. D’ailleurs, le jour où elle vient enfin signer chez Cristaldi elle débarque flanquée de ses deux frères, de sa sœur, de son père, de sa mère et même de sa grand’mère. Quant à la chevelure de Claudia qui lui balaie les reins, elle fait d'elle une actrice paradoxale et unique en son genre sur ce point précis? Toutes les actrice sont les cheveux courts et portent postiches et perruques à l'écran. Leurs cheveux sans ces artifices sont loin de faire illusion. Claudia a une chevelure sublime, incroyablement longue. Elle porte aussi perruque, parfois quand il faut qu'ils soient courts.
Il y a tant de clauses imposées par le clan Cardinale dans le contrat pour protéger l’intimité de Claudia que l’on parlera d’un contrat de mariage à l’américaine ! C’est bien simple on n’avait jamais vu ça. Surtout que…Cristaldi n’est pas en reste et stipule lui aussi tout un tas de clauses allant des cours d’italien au cours de diction, de maintient et de tout ce qu’il est possible d’imaginer quand il s’agit de fabriquer une star d’une simple jeune fille. C’est ainsi que pendant des années on ne vit Claudia que dans l’entourage immédiat de sa mère ou de sa sœur.
Cristaldi n’était pas inquiet et dès le début de leur collaboration, il aura une phrase prophétique.
Claudia ne croit pas un seul instant être capable de devenir une star. Elle lui énumère toutes les reines des écrans italiens : Gina Lollobrigida, Silvana Pampanini, Sophia Loren, Silvana Mangano, Lucia Bose, Gianna Maria Canale et d’autres encore contre qui elle n’envisage même pas de se comparer. Alors Cristaldi a cette réponse : "Peu importe, bientôt il n’y aura plus que toi et Sophia Loren."
Le public et les critiques la remarquent dès son deuxième film « Le Pigeon ». Immédiatement on parle d’elle comme d’une découverte essentielle du cinéma Italien.
Cristaldi a vu juste. Claudia est effarée. Cristaldi a raison. C’est elle qui va évincer toutes les divas nationales : Les Loren, les Lollobrigida, les Pampanini, les Mangano et autres Lucia Bose, Sandra Milo et Rossana Schiaffino en titre.
Dès lors on se l’arrache. Chose curieuse, les offres viennent tant d’Italie que de France ou d’Hollywood. Claudia tourne sans relâche.
Elle alignera 46 succès au box-office international en 13 ans.
Sagement conseillée par Cristaldi, Claudia répond aux offres les plus intéressantes d’où qu’elles viennent. Et comme il est dit dans son contrat, elle n’évoque rien. Rien de sa famille, rien de son intimité. Un journaliste un jour lui demande « Vous n’êtes pas la première à essayer de protéger votre vie privée mais personne n’a jamais réussi ! ». Et Claudia d’un air angélique : « Ah bon ? Moi j’y arrive très bien…Jusqu’ici en tout cas ». Claudia n’est pas dupe. Le journaliste a raison et elle le sait. Le monde ne sait rien d’elle. Ni de sa liaison avec Cristaldi, ni de son petit garçon.
Mais jusqu’à quand ?
Durant ses interviews elle a tellement peur de se trahir qu’elle hésite à chaque réponse et finit par trouver un faux-fuyant tout en banalité. « Pendant des années j’avais tellement peur qu’à chaque interview je suis passée pour une imbécile complète. Une idiote de première.»
Elle est donc devenue immédiatement une star internationale. Elle apprend l’Anglais et l’italien.
Elle brûle les étapes, tournant avec les plus grands dans des films prestigieux. L’italien c’est un peu en pure perte. On trouve sa voix rauque d’une vulgarité insoutenable et elle est automatiquement doublée. Elle n’est pas la seule. Gina Silvana et Sophia subiront longtemps le même affront. Leur voix décrétée trop vulgaire pour les distinguées oreilles romaines. Mais pour Claudia, c’est cette voix invraisemblable de camionneur tuberculeux qui sera une des clés de son succès.
La nouvelle star Italienne reste d’abord et avant tout les pieds sur terre. Elle est maman d’un petit garçon. Elle le fait passer avec la complicité de toute sa famille pour son petit frère. Personne n’est au courant. Même pas Cristaldi. La légende qui voudrait que ce soit Cristaldi qui lui ait conseillé ce mensonge est tout à fait fausse et on va voir Ô combien.
Son contrat avec la société de production de Franco Cristaldi, la « Vidés » lui alloue un salaire mensuel de départ de 600.000 lires par mois ce qui est un salaire très convenable pour une jeune starlette inexpérimentée. Mais après vingt films, le salaire de Claudia est toujours bloqué au même montant. Elle devient « La Super Star la plus mal payée du monde ». La Vidés passe alors son salaire à un million de lires et la star demande à sa secrétaire de rembourser la différence. « Mon salaire est très bien comme il est, j’ai été engagée alors que je n’étais rien et ne savais rien faire, c’est déjà merveilleux d’être payée pour apprendre un métier ! » Claudia Cardinale est pourtant parfaitement au courant qu’elle vaut 90 millions lorsque la Vidés la « prête » à une autre compagnie mais elle estime très bien que la société qui l’emploie fasse des bénéfices grâce à elle, c’est un juste retour des choses.
Ce que l’histoire ne dit pas, c’est que Claudia s’est installée dans une très vaste propriété avec toute sa famille et que Cristaldi via la Vidés paie tout et tout le monde. Loyer, repas, voitures, personnel, robes, bijoux… Absolument tout est pris en charge. Claudia n’a pas à toucher à son salaire. Elle n’a même pas à s’occuper de ses impôts. Pour le Guépard, elle touchera son million de lires mensuel, Burt Lancaster touche 465 millions !
Le jeune acteur Jacques Perrin tombe éperdument amoureux d’elle sur le tournage de « La Fille à la Valise » et sa grande passion clamée sur tous les toits (des principaux journaux) vaut à Claudia une publicité dont elle se serait bien passée car elle lui déplaît. Dès que l’on crie « coupez » sur le plateau, elle s’arrache des bras de l’acteur et court se réfugier dans les bras de sa mère ou de sa sœur Blanche. Laquelle, à tout hasard étudie alors l’art dramatique selon la méthode Stanislavski. Cristaldi a pris Blanche en grippe pour l‘influence qu’elle a sur sa sœur et dans sa correspondance l’appelle « Le problème ». La croustillante anecdote était encore toute chaude que déjà on disait Claudia très occupée à détruire le mariage de son partenaire suivant : Burt Lancaster. Ce qui était tout aussi faux. Autant le dire tout de suite, Claudia s’est fixée une ligne de conduite à laquelle elle ne dérogera jamais : « Jamais avec un acteur ».
Elle ne cédera pas et les plus sensationnels don juan de son époque en seront pour leur frais dès lors qu’ils sont acteurs. Et ce qu’elle en ait ou non elle-même envie. Un jour que l’on frappe sa porte, elle a la surprise de se trouver nez à nez avec…Marlon Brando. Celui-ci de passage à Paris pour quelques heures s’est dit qu’il pourrait les passer dans le lit de Claudia. Il ne passera même pas sur le paillasson ! Claudia lui claque la porte au nez après un refus plus ferme que poli. Devant la tête effarée de sa sœur, Claudia, pour une fois se demande si elle a bien fait de camper sur ses positions avec autant d’éternelle fermeté. Ce léger doute ne la fera quand même jamais céder à qui que ce soit.
Au milieu des années 60 est venue l’heure de l’aventure hollywoodienne. Et Claudia va bénéficier, si je peux dire, d’un traitement tout particulier. Les heures des comédies brillantes sont désormais comptées et la pauvre Claudia va payer fort de sa personne. Elle va tourner son premier film américain « Blindfold » avec Rock Hudson en partie dans des marais truffés d’alligators et de serpents. Or, même si la production lui assure avoir pris toutes les précautions possibles, Claudia a une peur bleue des reptiles et des serpents en particulier. Loin d’être remise de ses émotions elle se retrouve catapultée en plein désert californien sous un cagnard exceptionnel pour « Les professionnels ». Et si « Le plus grand cirque du monde » n’avait pas été tourné en Amérique elle y avait quand même été pas mal secouée.
Son box-office américain n’étant pas à « la hauteur des espérances du studio » tout comme ceux de Sophia Loren et Gina Lollobrigida, on rendra quand même hommage à son courage en parlant d’elle comme d’une bonne camarade et d‘une actrice très courageuse. C’était bien le moins !
Elle devient madame Cristaldi en 1966. Ou plus exactement elle devient officiellement madame Cristaldi…Dans la presse. Des années plus tard, en veine de confidences, Claudia déclarera qu’elle ne s’est tout bonnement jamais mariée.
Franco Cristaldi a lui aussi un fils, Massimo, un tout petit peu plus âgé que le fils de Claudia et les deux garçons jouent déjà ensemble comme deux frères. Claudia se décide à dire la vérité à Cristaldi avant de faire l’annonce de leur mariage. Le petit garçon n'est pas son petit frère il est son enfant. Cristaldi entre dans une rage folle et il s’en est fallu d’un cheveu que cesse toute relation, professionnelle ou autre entre ces deux-là.
Cristaldi calmé, Cristaldi pardonne. Le couple mettra une fausse cérémonie de mariage en scène mais Franco Cristaldi adoptera officiellement le fils de Claudia. Par contre, même en 1966, parler d’un viol et de l’enfant d’un viol est encore impensable. D’ailleurs ce sont les femmes qui « avouent » un viol. Pas les violeurs ! C’est dire. Alors, avec l’accord de Cristaldi cette fois, Claudia va avouer que son petit frère est son fils. Elle ne supportait plus de le faire vivre dans un mensonge perpétuel. Mais il faudra en inventer un autre. Un bel amour de jeunesse aux yeux de braise qui la fin de l’été venue laissa Claudia et ignorant toujours son état.
Elle vivait ainsi avec un mari qui n’était pas son mari et un frère qui était son fils. Mais après tout le monde du cinéma n’est-il pas un monde de fiction ?
Et encore, dire que Claudia vivait avec Cristaldi est faux. Ils avaient deux propriétés séparées Via Flaminia. Une grande ferme-villa pour Claudia, un petit château renaissance pour Franco Cristaldi.
1966, c’est aussi l’année où ses dons de comédienne sont enfin unanimement reconnus.
Elle a fêté l’année nouvelle à Hollywood. Elle vient de terminer « Les professionnels avec Burt Lancaster. C’est la seconde fois qu’ils sont partenaires. Si sur le tournage du Guépard il était très disant, pour ne pas dire lointain entre les scènes, sur ce second film il s’est pris d’amitié pour Claudia et passe le tournage aux petits soins avec elle. Ce fut pareil avec Alain Delon qui gardait ses distances et prenait son travail trop au sérieux pour s’intéresser à Claudia. Mais en 1966, ils ont été partenaires déjà trois fois et Claudia est devenue une intime du couple Delon et de leur petit garçon. Antony Quinn quant à lui ne tarit pas d’éloges à propos de Claudia. Elle le lui rend bien « Quand il joue c’est un lion, une force de la nature comme Burt. Mais entre les scènes c’est un vrai prince aux petits soins. » Evidemment, Hollywood était à l’affût du moindre scandale, de la plus petite amourette. Mais sa journée de tournage finie, Claudia salue tout le monde et rentre chez elle. Les potinières en sont pour leurs frais, elles ne lui arrachent qu’un éclatant sourire mais aucune réponse à leurs questions sauf cette phrase « Le jour où je me marierai ce ne sera pas pour divorcer trois semaines plus tard même si c’est à la mode. Ce sera pour la vie alors vous aurez bien le temps d’être mises au courant ! ».
Toujours en 1966, Claudia devient une « grande » après la sortie de « Sandra » où elle est particulièrement brillante. Le film est dirigé par Luchino Visconti et le grand maître n’hésite pas à considérer Claudia comme sa muse. Il la trouve d’une beauté folle, charnelle et mystérieuse.
Il ne la comprend pas. Elle est pour lui un mystère sublime. Alors c’est lui qui va tous les matins la chercher en voiture chez elle pour l’amener au studio. Tout le long du chemin il lui parle, parle sans arrêt. Il lui parle de lui, ce qui ne lui permet pas d’apprendre grand-chose sur Claudia.
Jean Sorel, le partenaire de Claudia dans « Sandra » se souvient de son arrivée sur le plateau pour la première fois.
Claudia tournait une scène toute simple. Elle marchait vers son lit en lisant un télégramme.
Une scène qui en général demande deux prises, trois au maximum. Mais Visconti la fait recommencer encore et encore. Obnubilé par le mystère Claudia qu’il ne parvient pas à élucider, il sait que quelque chose ne fonctionne pas. Mais quoi ? Il finira par trouver.
Le rythme ! Le rythme de la marche de Claudia. La marche ne traduit pas ce qui est écrit dans le télégramme !
Alors, lorsque Jean Sorel arrive, Luchino Visconti est couché à plat ventre et tient Claudia par les chevilles pour lui « insuffler le rythme » ! Pauvre Jean Sorel qui se voyait déjà subir le même traitement. Visconti aura sa révélation au cours d’une autre scène tout aussi terriblement banale. Une scène ou Claudia tend un verre d’eau à Jean Sorel. Visconti découvre stupéfait mais au comble de la satisfaction que le regard de Claudia peut exprimer une chose alors que la commissure des lèvres peut exprimer tout autre chose, voire même démentir l’expression donnée par le regard. Claudia mise au courant par le maître en personne en resta stupéfiée à jamais !
Considérée comme un nouveau « Sex Symbol », elle n’est pas trop d’accord sur le principe. « Je ne crois pas être un symbole sexuel comme Brigitte, je suis une fille quelconque avec un visage enfantin et un joli sourire, un joli corps, peut-être, mais qui n’a rien d’érotique. Je suis quelqu’un de très simple et je ne sais pas ce que les gens trouvent de mystérieux en moi à part leur propre imagination. D’ailleurs, j’ai les oreilles décollées et bien trop grandes, les jambes courtes et une voix abominablement rauque. Les hommes peuvent-ils admirer une telle femme ? »
Le film « Sandra » reçoit le grand prix du festival de Venise. Paradoxalement, 1966 est une année noire financièrement pour Claudia. Elle s’est lancée simultanément dans un projet à la télévision et un autre au théâtre. Les deux sont des catastrophes sans nom qui la laissent complètement démunie, l’obligeant à se trouver un emploi…dans une banque. Claudia est peu faite pour cette vie et commet des erreurs dans son travail. Rien de bien phénoménal, un million de lires au total. Mais puisque Claudia quitte son poste juste après avoir commis ces erreurs, elles vont être considérées comme détournements de fonds. Elle sera traînée et condamnée en justice pour ces faits 13 ans plus tard.
En seulement quelques années elle a égalé ses illustres consœurs. Claudia a entamé les années 60 en étant une des plus grandes stars du monde et l’est restée. On se l’arrache littéralement, seules Sophia Loren et Brigitte Bardot ont un tel prestige à l’époque. Claudia reste elle-même malgré le tumulte qui entoure sa personne, déclarant un jour : « Je ne suis une star qu’extérieurement, au fond de moi je suis toujours la petite Claude. J’habite des villas, je roule en limousine, j’ai des chauffeurs, des domestiques et des milliers de robes, mais c’est mon métier, c’est ainsi que je plais et que les gens me veulent, s’il n’y avait que moi… »
Peu à peu le cinéma se transforme. Les films sont plus violents, plus érotiques.
On aborde d’autres sujets. Le viol, la drogue, l’inceste, les grandes comédies américaines dont Claudia a tâté avec Rock Hudson disparaissent. Une Ava Gardner, une Lana Turner, une Gina Lollobrigida ont une assez belle carrière derrière elles pour passer sobrement la main plutôt que de s’impliquer dans un cinéma qui ne leur correspond plus. Mais Claudia est trop jeune.
Egérie du cinéma d’auteur Italien, Claudia s’intègre magnifiquement à un cinéma d’hommes : « Le Guépard » « Les Aventuriers », « Il était Une Fois Dans L’Ouest ». Elle reste une des actrices les plus actives de son époque, confrontée parfois à des situations réelles qui valent bien celles de ses films. Pour « Le Guépard », Luchino Visconti trouve le petit village sicilien idéal pour y planter ses décors. Un petit village aussi isolé que perdu où ne mène qu’une seule petite route insuffisante pour les allées et venues que nécessitera son tournage. Qu’à cela ne tienne, Visconti en fait construire une. Lorsque les travaux sont terminés, il doit quitter les lieux sous les menaces de la mafia locale. Le cinéaste n’a pas fait appel à des entreprises validées par ces messieurs à chapeaux mous. Lesquels ont quand même eu la délicatesse de le laisser finir sa route avant de montrer leurs jolis revolvers.
Sur le tournage la chaleur est accablante et Claudia, à cause des retards cumulés par le film se retrouve dans une situation délicate. Elle tourne simultanément « Le Guépard » en Sicile et « Huit et demi » à Rome pour Fellini. Impossible de se désister. Claudia joue…Claudia Cardinale dans le film de Fellini. Et donc, décide le maestro, plus question de te doubler, ce serait ridicule une Claudia Cardinale sans la voix de Claudia Cardinale. Pour Claudia c’est terrible. Sa voix lui fait honte !
Et puis Fellini la désarçonne complètement. Lorsqu’elle arrive sur le plateau, parfaitement coiffée et maquillée, tout est en place. Eclairages, décors, figurants…Tout sauf Fellini qui fait les cent pas sans savoir encore ce qu’il va filmer. Il lui refile des bouts de papier griffonnés avec « tu vas faire ceci, tu vas dire ça ». Et Claudia n’arrive pas à déchiffrer son écriture ! Et puis c’est le retour à Palerme pour « Le guépard » et un réalisateur qui ne néglige aucun détail, aucune improvisation, aucun à peu près. La scène du bal va se tourner durant plus de 60 nuits. Claudia décomplexée par Fellini va offrir le plus mémorable rire de l’histoire du cinéma. Dans la grande scène du dîner, elle éclate de rire mais d’un rire gras et vulgaire qui scandalise l’assistance très collet monté. Un rire qui dure jusqu’à ce que tout ce beau monde s’égaille comme un élevage de perruches affolées.
Beaucoup d’actrices ont tourné deux chefs d’œuvres à la suite. Seule Claudia Cardinale en a tourné deux en même temps. Claudia va traverser les années 70 et 80 auréolée d’un prestige sans taches, cultivant habilement sa réputation de « sex symbol ». Et puis, la belle n’a pas sa langue dans sa poche. Elle n’hésite jamais à clamer haut et fort ses opinions, qu’elles plaisent ou non. Elle défend allègrement les causes qu’elle estime justes comme l’égalité des droits de la femme ou le respect des homosexuels. Elle assez dû mentir et louvoyer pour ne pas heurter les bonnes mœurs des années 50 pour encore fermer son clapet alors que le mot « liberté » résonne dans tous les coins du monde !
Elle se met d’ailleurs poliment en retrait dès qu’elle le peut : « Je ne suis pas un monstre sacré du cinéma, moi-même je ne me considère pas comme une grande actrice, je suis une jolie fille qui a eu de la chance, mais je n’ai aucun talent artistique, je ne sais pas jouer la comédie, je n’ai jamais appris, je dois aller chercher dans mes propres émotions des choses à présenter au public et c’est une souffrance. » Claudia est une actrice de talent admirée par Luchino Visconti à jamais et peu avare de ses charmes…en tout cas c’est ce qu’elle laisse croire.
Ses photos abondamment publiées par Playboy ou Lui ne « montrent » jamais rien. Ce sont des sortes de promesses faites aux hommes pour les rassurer sur sa prodigieuse plastique.
Claudia Cardinale ne pose pas nue, ne tourne pas nue. Elle est avec Raquel Welch et Virna Lisi le « sex symbol pudique » de son temps. Dans « Les pétroleuses », c’est Brigitte Bardot qui paiera de sa plastique. Claudia de son côté apprendra à monter à cheval et prendra des cours de boxe.
Au passage elle a « divorcé » d’avec Cristaldi en 1975 pour vivre avec le producteur Pasquale Squitieri. C’est Cristaldi qui avait imposé Claudia à Squitieri. Squitieri n’en voulait pas. Il avait horreur des stars de cinéma et de tout leur barnum de grande vedette. Claudia, du coup, en tomba follement, éperdument amoureuse. L’affaire fit scandale. Cristaldi est un homme puissant.
Durant quatre ans, personne n’osera se risquer à engager Claudia au risque de s’en faire un ennemi. Franco Cristaldi partagera ensuite la vie de la somptueuse actrice Erythréenne Zeudi Araya jusqu’à ce qu’il décède à Monaco le 1 juillet 1992.
Claudia mettra au monde la petite Claudia junior en 1979, il y aura 23 ans de différence d’âge entre la petite Claudia et son grand frère. Qui, presqu’en même temps, fait de Claudia la grand’mère d’une petite Lucille ! Pour Claudia, cette naissance n’est pas un coup de tête ou du hasard, Claudia et Pasquale vivent ensemble depuis 1973. Claudia retarde ses tournages suivants pour s’occuper un maximum de sa fille et de sa petite fille. C’est à cette époque que ressurgit l’affaire des détournements de fonds. Claudia est condamnée à deux ans et deux mois de prison ! Avant bien sûr que tout cela ne s’arrange entre personnes de bonne volonté.
La cinquantaine venue, Claudia délaisse à la fois le cinéma et ses exhibitions de charme. Elle est une véritable icône du cinéma mondial une égérie de la haute couture. Elle écrit et se lance dans une carrière théâtrale en 2000 ! Elle reste une comédienne active au cinéma et même à la télévision, honorant parfois de son élégante présence un film ou un téléfilm qui lui ont semblés dignes d’intérêt. Elle tournera de plus en plus parcimonieusement, certes, mais jusqu'à plus de 80 ans.
Aujourd’hui Claudia vit à Paris. Elle a eu une liaison avec le président de la république Jacques Chirac. Elle a publié ses mémoires et continue de vivre comme elle l’a toujours fait, c'est-à-dire comme elle l’entend. Claudia a longtemps veillé à perpétrer sa légendaire beauté sans tomber dans les excès chirurgicaux en tout genre. Puis, un jour, sans doute lassée, elle a laissé le temps faire son œuvre et s'est régalée de rôles de vieilles mémères décaties assorties à son âge désormais vénérable.
Celine Colassin
QUE VOIR ?
1958 : Le Pigeon : Ce n’est pas le premier film de Claudia mais c’est son premier film intéressant.
1959 : les Noces Vénitiennes : Claudia n’est pas encore une star, c’est Martine Carol qui a son nom en haut de l’affiche.
1959 : Un maledetto imbroglio (Meurtre à l’italienne) Enquête policière classique mais non dénuée d’humour autour du meurtre de la belle Eleonora Rossi Drago. Claudia est la petite bonne nunuche de la victime et très amoureuse de Nino Castelnuovo.
1959 : Hold-Up à la Milanese : « Le Pigeon » avait fait un tel succès qu’il eut une suite quasi immédiate que voici et qui passa complètement inaperçue malgré la brillante affiche réunissant Vittorio Gassman et Renato Salvatori autour de Claudia.
1959 : Entrée de Service : Amusant petit film à sketch où Claudia croise Mylène Demongeot.
1960 : La Fille à la Valise : Claudia tient son premier rôle titre dans un excellent film où elle est superbe, un personnage dira-elle qui lui ressemble : « une fille simple, pauvre et jolie »
1960 : La Viaccia : Claudia est pensionnaire de maison close belle époque pour le plaisir d’un surprenant Jean-Paul Belmondo. C’est ahurissant de voir à quel point le cinéma Italien exploite bien mieux la personnalité de l’acteur que le cinéma français.
1960 : Les Dauphins : Surnom donné en son temps à une jeunesse italienne riche, oisive et peu férue de moralité. Claudia contraint son amant au mariage : le beau Gérard Blain. On peut comprendre que la fin justifie les moyens.
1960 : Austerlitz : Claudia recroise Martine Carol pour le film d’Abel Gance.
1960 : Rocco et ses Frères : Le film est un chef d’œuvre de Luchino Visconti, Rocco c’est Alain Delon qui sera lâchement trahi par Annie Girardot en état de grâce.
1961 : Les Lions sont lâchés : Claudia découvre le cinéma Français et ses gloires, elle partage l’affiche avec Michèle Morgan et Danielle Darrieux sous la direction d’Henri Verneuil.
1961 : Le Bel Antonio : Il s’agit pour l’occasion de Marcello Mastroianni, tellement fasciné par la beauté de sa jeune femme Claudia Cardinale qu’il lui est impossible de « consommer le mariage ». Et ce malgré sa réputation de Don Juan invincible. Le sujet un peu scabreux pour l’époque a mis dix ans avant de pouvoir être porté légalement à l’écran.
1961 : Cartouche : C’est Philippe De Broca qui dirige maintenant Claudia dans le rôle de Vénus au côté d’un Jean-Paul Belmondo hyper kinésique !
1961 : Auguste : Claudia fait une apparition en tant que Claudia Cardinale dans ce film mené par Fernand Raynaud !
1962 : Quand la Chair Succombe : Quel titre ! C’est Anthony Franciosa qui succombe pour Claudia, sublime en garçonne des années 20.
1963 : Huit et Demi : Claudia retrouve Fellini qui fait d’elle un fantasme, ni plus ni moins. C’est la première fois que Claudia ne sera pas doublée, Fellini exige qu’elle garde sa voix au grand désespoir de l’actrice qui déteste plus que tout entendre ce son rauque produit par ses cordes vocales. Plus tard elle changera d’avis et en remerciera Fellini
1963 : Le Guépard : Un autre chef d’œuvre de Visconti avec Burt Lancaster, Alain Delon, Serge Reggiani et un certain Mario Girotti qui ne s’appelle pas encore Terence Hill.
1963: La panthère Rose : Claudia dirigée par Blake Edwards dans son film culte avec Peter Sellers, Robert Wagner, David Niven, Capucine, Ursula Andress et Romy Schneider. Le film aura huit suites et le personnage du générique connaîtra lui aussi une longue carrière jalonnée de succès puisque c’est la panthère rose chère à nos cœurs enfantins !
1963: Meurtre à l’Italienne : Si le public s’attendait à une suite hautement fantaisiste de « Divorce à l’Italienne » du même réalisateur, il en fut pour ses frais malgré quelques pointes d’un humour noir assez cruel
1964 : le Plus Grand Cirque du Monde : Voici Claudia à Hollywood pour y être la fille de John Wayne et Rita Hayworth. J’ai connu des castings plus cohérents.
1964 : Les Deux Rivales : Le titre est assez racoleur, et il y a en fait assez peu de rivalités dans ce film assez sombre et pour tout dire assez raté, Shelley Winters et Paulette Goddard sont de la partie, et le tout s’articule autour de Rod Steiger excellemment abject. Le titre original était « les Indifférents », ça correspond mieux à ce film.
1964 : La Ragazza : Luigi Comencini donne à sa Claudia-Ragazza Georges Chakiris comme partenaire, ce qui la change de Lancaster et Wayne. Malheureusement, Georges Chakiris avec sa banane à la Dick Rivers a l’air d’un résistant italien comme moi d’un rutabaga. Claudia résolument « sixties » avec ses invraisemblables perruques rend le tout encore plus incrédible. Le film de scène en scène perd en intérêt ce qu’il n’avait pas en crédibilité et on se surprend à s’ennuyer furieusement.
1964 : Les Professionnels : Claudia retrouve Burt Lancaster qui s’était peu préoccupé de son existence sur le plateau du « Guépard » mais qui maintenant est aux petits soins envers sa précieuse personne.
1966 : Sandra : Claudia retrouve encore Luchino Visconti qui ne se lasse pas de son actrice et lui concocte des films sur mesures. Claudia connaît un véritable triomphe avec Sandra, fille de Marie Bell et un tantinet amoureuse de son frère, le beau Jean Sorel. On pourra préférer le titre premier du projet : « Les Etoiles de la Grande Ourse »
1966 : Les Yeux Bandés : Je reste persuadée que le film avait été prévu pour Gina Lollobrigida, mais c’est néanmoins Claudia qui la remplace pour former un team d’espions avec Rock Hudson.
1966 : Les Centurions : Impossible d’être mieux entourée. Alain Delon, Anthony Quinn, Maurice Ronet et Michèle Morgan !
1967 : Une Rose pour Tous : Cette rose est Claudia, de mœurs légères, ou plus exactement « bonne fille » dans une comédie italienne d’un intérêt vraiment très relatif.
1967 : Comment réussir en Amour sans trop se fatiguer : Ceci est supposé être une comédie américaine hilarante, elle ne l’est pas. Tony Curtis en fait des tonnes, Claudia suit le mouvement et Sharon Tate, est là, belle et dubitative. Il fallait faire le film 30 ans plus tôt avec Jimmy Stewart, Katharine Hepburn et Ginger Rogers.
1967 : Les Ogresses : Film à sketches où quatre réalisateurs Italiens se penchent sur de somptueuses actrices avec humour. Mario Monicelli dirige une Claudia fermement décidée à faire succomber son médecin, quitte à employer la force. Les autres comédiennes en action sont Monica Vitti, Raquel Welch et Capucine.
1968 : Il Etait une Fois dans l’Ouest. Claudia n’a peur de rien. Même pas d’un western de Sergio Léone.
1968 : Un Couple pas Ordinaire : Claudia retrouve Rock Hudson pour un film débile où elle est une voleuse de bijoux tellement douée qu’elle en vole des faux.
1969 : Nell ’Anno del Signore (Les Conspirateurs) : Un joli film historique, peut-être un peu bavard et qui aurait mérité un montage plus dynamique. On retrouvera Claudia en jeune femme juive révoltée et tiraillée entre Robert Hossein et Renaud Verley. Inspiré d’un fait historique et malgré quelques incohérences, le film fit un triomphe et est considéré en Italie comme un véritable monument du cinéma national. Il ressort régulièrement et est à ce jour le dixième plus gros box-office italien de tous les temps.
1969: Certo, Certissimo, Anzi…Probabile (Diary of a telephone operator): Encore une comédie italienne vaguement polissonne comme il s’en tourne par tonnes à l’époque ; Celle-ci compte sur la réputation physique de ses interprètes puisque les rôles principaux sont tenus par Claudia, Catherine Spaak, John Philip Law, l’ange aveugle de « Barbarella » et Robert Hoffman qui bouleversa tant la libido de Danielle Darrieux dans « 24 Heures de la Vie d’une Femme ».
1971 : L’Audience Ce film est digne d’intérêt, Claudia y est une prostituée au service du Vatican.
1971Popsy Pop : Claudia est littéralement déchaînée dans ce film abominablement raté et de plus elle chante. C’est Jean-Marie Rivière, alors directeur de l’Alcazar qui crée le costume et la chorégraphie de Claudia pour le film. Dès la prise de vue terminée, il récupère le costume qui finit ses jours sur le dos d’un transformiste sosie de Claudia au célèbre cabaret parisien. Pour les amateurs d’anachronismes, notons la présence de Ginette Leclerc.
1971Les Pétroleuses : Le film n’est pas à proprement parler un chef d’œuvre .Mais la bagarre entre Claudia Cardinale et Brigitte Bardot est un véritable morceau d’anthologie et probablement l’une des scènes les plus célèbres de l’histoire du cinéma. Claudia chante encore.
1972 : La Scoumoune : Claudia est confrontée à Jean-Paul Belmondo et Michel Constantin, ce qui n’est déjà pas drôle mais qui plus est, son look années 30 est complètement foiré et ses cheveux sont oranges
1972 : Une Fille en Australie : Ce film sans intérêt eut les honneurs du festival du film de…Téhéran, projeté lors du gala de clôture. Toute une époque. Le public applaudit bien fort Claudia prostituée et minijupée épousant un parfait imbécile pour son argent.
1973 : Il Giorno del Furore (Avril Rouge) : Les héros Russes du roman de Lermontov, sont ici incarnés par Claudia Cardinale l’Italienne et Oliver Reed l’Anglais.
1974 : I Guappi : Intéressant film sur les débuts de la camorra. Claudia se prostitue une fois de plus et le premier rôle est confié à Fabio Testi que l’on aurait souhaité plus habité pour jouer le protecteur et rival de Franco Nero. Claudia rencontre le futur père de sa fille Claudia jr. Le réalisateur Pasquale Squitieri. Le film reste d’une grande beauté 40 ans après avoir été tourné et son rythme lent reste paradoxalement très efficace. Raymond Pellegrin complète la distribution, dans un autre genre que Fabio et Franco il est vrai.
1975 : Histoire D’Aimer : Monica Vitti passe aux assises avec une perruque rose. Elle a tué son mari, Claudia est dans le juré et se dit qu’elle a bien fait.
1975 : Ici Commence l’Aventure : Claudia et Monica Vitti se retrouvent pour un film pseudo humoristique et qui s’intitule aussi pour des raisons hautement stratégiques : « Une Brune, une Blonde et une Moto ». l’action est régulièrement interrompue par des extraits de vieux westerns en noir et blanc.
1975 : Violence et Passion : Luchino Visconti, toujours follement passionné par Helmut Berger articule autour de l’éphèbe autrichien un film à la distribution de qualité puisque Burt Lancaster et Silvana Mangano en sont les piliers. Claudia est l’épouse de Burt, un petit clin d’œil au Guépard.
1976 : La Part du Feu : Michel Piccoli en promoteur assoiffé de pouvoir, Jacques Perrin en jeune loup aux dents acérées et Claudia en épouse infidèle. Si la réflexion sur le pouvoir que proposait le scénario avait tout pour faire un film haletant, Etienne Perier le réalise platement et réussit à coup de stéréotypes éculés à nous ennuyer un tantinet.
1977 : L’Affaire Mori : Un excellent film sur la mafia traitée par les Italiens avec un excellent Guillano Gemma en tête d’affiche.
1978 : La Petite Fille en Velours Bleu : C’est bien filmé et bien lent, on dirait un Visconti. Le scénario est assez trouble et à mon avis ne serait plus tourné aujourd’hui, la morale du XXIème siècle ne permettant plus que l’on accepte les tendances douteuses de Michel Piccoli irrésistiblement attiré vers la fille prépubère de Claudia.
1979 : Bons Baisers d’Athènes : C’est très tarabiscoté mais avec David Niven en pope, Roger Moore en commandant allemand, Telly Savalas et Eliott Gould. Même William Holden fait une apparition. Le film se voulait d’abord une comédie même si c’est un film de guerre et Claudia y joue les filles légères avec beaucoup de conviction. Malgré ce casting étincelant c’est un film de série Z dont on ne retiendra que les paysages de l’île de Rhodes. Et quand le décor est plus intéressant que l’action...
1981 : La Salamandre : Claudia encore richement entourée, cette fois par Franco Nero et Anthony Quinn.
1982 : Fitzcaraldo : Un film de Werner Herzog tiré d’une histoire vraie aussi hallucinante que le film. Klaus Kinski est bien sûr dans son élément.
1982 : La Peau : Claudia chez Liliana Cavani face à Marcello Mastroianni et…Burt Lancaster.
1982 : Le Cadeau : Qui n’en est pas un, loin de là. Bien que Claudia se démène tant et plus pour faire décoller le film, cette histoire de rivalité entre Clio Goldsmith et elle, deux des plus belles femmes de leur temps, pour les beaux yeux de…Pierre Mondy me laisse perplexe. Le film est d’une drôlerie raffinée étourdissante, on a juste oublié les tartes à la crème. Claudia paye de sa personne pour faire rire en tombant à l’eau dans un canal de Venise. Après une pluie de films prestigieux en Italie dont beaucoup n’ont, hélas, pas franchi les frontières, que le cinéma Français refasse appel à Claudia pour ça est d’un divin pathétique.
1983 : Le Ruffian : Claudia ne fait que passer dans les aventures tumultueuses de Lino Ventura et Bernard Giraudeau.
1983 : Henri IV le Roi Fou : Quel bonheur que de retrouver Claudia face à Marcello Mastroianni.
1983 : Claretta : Pascale Siquieri donne à son épouse un magnifique premier rôle à défendre face à Giuliano Gemma et Catherine Spaak.
1985 : L’été Prochain : Claudia dirigée par Nadine Trintignant entre Philippe Noiret et Jean-Louis Trintignant.
1985 : La Donna Delle Meraviglie : Pas vu.
1986 : La Storia : De Luigi Comencini : Attention, chef d’œuvre, silence et respect, même si ce film était au départ destiné à la télévision.
1987 : Un Homme Amoureux : Diane Kurys explore les coulisses du cinéma et s’en sort moins bien qu’avec celles de son adolescence. Greta Scacchi en qui on voyait la nouvelle Garbo des années 80 est la somptueuse vedette de la chose.
1989 : Hiver 54 : Biographie filmée de l’abbé Pierre durant l’hiver 54, donc, et incarné par Lambert Wilson. Claudia est sa bienfaitrice.
1989 : La Révolution Française : Claudia est madame de Polignac pour les fêtes du bicentenaire. La distribution de ce film dirigé par Robert Enrico est fascinante même si on peut s’étonner de trouver une Jane Seymour en Marie Antoinette ou…Sami Naceri dans la figuration.
1990 : Les Cavaliers de la Gloire : Beau film très épique mené par Harvey Keitel.
1991 : Mayrig : Henri Verneuil se lance dans une autobiographie filmée. Il confie le rôle de sa mère à Claudia Cardinale, son père sera Omar Sharif
1991 : Acte d’Amour : Claudia face à Bruno Cremer dans l’enfer de la drogue.
1992 : 588 Rue Paradis : La suite de Mayrig
1994 : Elles ne pensent qu’à ça : Des années plus tard, la réalisatrice Charlotte Dubreuil regrettait encore son casting. Avoir fait de Carole Laure la fille de Claudia Cardinale n’est en effet pas du plus subtil !
1996 : Un Été à la Goulette : Claudia dans son propre rôle et dans un joli film sur la religion.
1997 : Riches, Belles Etc. : Dommage que ce film soit resté incroyablement méconnu avec un tel casting. Claudia, Anouk Aimée et Marisa Berenson en état de grâce…Même Sonia Rykiel est dans le coup.
1997 : Sous les Pieds des Femmes : Pas vu
1997 : Kini et Adams : Pas vu
1998 : Ennemis Intimes : Claudia dirigée pour la dernière fois par Werner Herzog et donnant la réplique à l’acteur fétiche de ce dernier : Klaus Kinski.
1999 : Brigands : Claudia dirigée par son mari dans un policier qui n’a pas passé les frontières.
1999 : Un Café, l’Addition : Un joli court métrage avec Hélène de Fougerolles.
2002 : And Now…Ladies and Gentlemen : Un Lelouch passé entièrement inaperçu comme tous ses films depuis « La Belle Histoire ». On est émerveillé par ce réalisateur qui a tant proclamé son amour des acteurs confie un premier rôle à Patricia Kaas.
2007 : Cherche fiancé, tous frais payés : Claudia en mère d’Alexandra Lamy pour un film qui ne vole pas beaucoup plus haut qu’un gars et une fille, ce qui le place quand même nettement au dessus de la production américaine du même acabit.
2010 : Le Fil : Claudia en tête d’affiche dans un film français tourné en Tunisie dirigé par Mehdi Ben Attia qui fait de la diva italienne une mère tunisienne. Claudia à la faveur de son veuvage revoit son fils qui étudie l’architecture en France. Il en profite pour lui avouer son homosexualité. Le film manque singulièrement d’audace et on a l’impression très vite de se retrouver dans un « Joséphine ange gardien ». Claudia est tout simplement magnifique et sauve l’ensemble.
2010 : Un Balcon sur la Mer : Claudia Cardinale en mère de Jean Dujardin dans un film de Nicole Garcia.
2010 : Sinyora Enrica Ile Italyan Olmak : Claudia étant une star immense en Turquie, la voici accueillie en grande dame dans son cinéma.
2012 : O Gebo e a Sombra : Un film de Manoël de Oliveira qui réunit Claudia au génialissime Michael Lonsdale et le non moins prestigieuse Jeanne Moreau.
2012 : El Artisto y la Modela : l’Espagne réunit Claudia et Jean Rochefort aux prises avec le corps d’une jeune réfugiée espagnole qu’il peine à traduire à travers son art. Intelligemment filmé en noir et blanc pour poétiser la nudité, un joli film passé bien tristement inaperçu.
2013 : Joy de V : Ce film présenté en avant première du festival Slamdance a vivement impressionné le jury.
2013 : Father : Claudia retrouve Franco Nero
LES FILMS QUE VOUS NE VERREZ PAS
(Avec Claudia Cardinale)
Le Vice et La Vertu : Vadim décrète que ses deux héroïnes seront Claudia en vertu et Jeanne Moreau en vice. Les rôles seront respectivement tenus par Catherine Deneuve et Annie Girardot.
La Dame aux Camélias : Marcel Carné portait ce projet depuis longtemps et Jeanne Moreau qui s’était proposée pour le rôle fut éconduite (et très vexée). Carné voyait en Claudia sa dame aux camélias, son Armand Duval devant être interprété par Jacques Charrier mais le film ne se fit pas.
Polichinelle : Roberto Rossellini avait annoncé ce film où il devait diriger Claudia mais le projet avorta ce qui lui permit de signer pour « Le Guépard ».
La Fille au Kimono : Ce film annoncé en 1965 devait réunir Claudia et Glenn Ford.
Où vas-tu Lavinia : Encore un projet de grande envergure annoncé en 1967 et qui ne verra pas le jour. Dommage, Claudia devait y donner la réplique à Lauren Bacall !
Jésus de Nazareth : Difficile de dire s’il est bienvenu de nommer ici l’œuvre fleuve (six heures) de Franco Zeffirelli. Tout d’abord il s’agit d’un « téléfilm », une commande spéciale du pape Paul VI en personne et qui est régulièrement reprogrammée depuis sa première diffusion en 1977. Souvent cependant le rôle de femme adultère de Claudia est absent de nombreuses copies.
Les Hommes de Fer : Durant sa période américaine, Franco Cristaldi rêve de faire tourner Claudia avec le très à la mode Sidney Poitiers mais le film ne se fera pas.