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ISA MIRANDA

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Isa Miranda naît sous le patronyme complet de Ines Isabella Sampiero dans le Milan de 1909. Qui croirait alors que la fille d’un conducteur de tramway deviendrait tour à tour l’icône du cinéma fasciste italien, l’espoir manqué d’Hollywood, la résistante discrète face aux régimes autoritaires, la comtesse crépusculaire de Fellini ? Une femme qu’on voudra comparer à Marlene Dietrich, qu’on tentera de transformer en Greta Garbo. Mais une femme qui s’en fichant complètement, restera d’abord, avant tout, uniquement… Isa Miranda. Une figure de contradictions internationale donnant la réplique à Gerard Philipe ou Jean Gabin. Insaisissable, un peu spectrale, inoubliable.


La future Isa Miranda travaille très jeune comme coursière puis en usine, avant de devenir secrétaire. Elle apprend la dactylographie avec la discipline des enfants qui n’ont pas le choix. Je savais ce que c’était que d’aller se coucher le ventre vide dira-t-elle plus tard.

Quand elle arrive au cinéma, c’est presque par hasard.  En 1932, son rôle dans Les Hommes, quels mufles ! la propulse en une nuit. Le public découvre un visage à la beauté étrange, glaciale, mais traversée de fêlures. L’Italie se passionne pour cette nouvelle idole. En quelques films, Isa Miranda devient la star internationale du régime, la vitrine d’un cinéma glamour que Cinecitta et son Duce veulent opposer à Hollywood.

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La Paramount flaire la bonne affaire : elle sera la nouvelle Garbo, ou la Dietrich italienne. On la couvre de robes sublimes, on met Edith Head à son service, on l’entoure de photographes. Hollywood adore façonner ses étoiles, et Miranda possède ce mélange de dureté et de mystère qui rappelle les reines du box-office. Mais pas de chance. Isa Miranda ne se laisse pas enfermer. Son anglais est hésitant, elle apprend ses répliques phonétiquement. On la dit trop indépendante, trop rétive aux stéréotypes que les studios lui proposent. Un accident de voiture, des rivalités de coulisses et surtout son refus de se laisser modeler font échouer l’opération Hollywood.« Hollywood est un train rapide. J’y suis montée trop tard, et je suis descendue trop tôt. »

À son retour en Europe, le régime fasciste italien ne lui pardonne pas son escapade hollywoodienne. On efface son nom des journaux sur ordre du ministère, son passeport est confisqué pour l’empêcher de repartir. Goebbels l’admire et n’a de cesse que de créer une nouvelle Dietrich pour son Reich. L’originale ayant méprisé l’offre d’un haut le cœur.  Il l’invite en Allemagne et organise un dîner officiel de très haute volée en son honneur. L’invitée est absente. En fuite vers Lugano, puis Paris. Son art de se faire des amis !

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Ces années sont cinématographiquement celles d’une actrice en disgrâce, soupçonnée d’ingratitude, Mais le courage de refuser de tourner des films de propagande, sa volonté de se tenir à distance des compromissions forge une légende parallèle.

La guerre terminée, le destin continue son œuvre. En décembre 1945, à Rome, elle est victime d’un grave accident de voiture. Elle entre en collision avec un camion militaire allié sur la via Nomentana. Elle survit, marquée, mais poursuit son chemin. Cette fragilité physique se mêle désormais à son image publique : une beauté qu’on croit invincible, mais que la vie n’épargne pas.

En 1949, Isa Miranda renaît grâce au néo-réalisme. Dans Le Mur invisible de Renato Castellani. Elle joue une prostituée. Loin des robes lamées et des sourires glacés, elle apparaît dépouillée, humaine, tragique. Cannes lui décerne le prix d’interprétation féminine. La critique italienne, qui l’avait longtemps snobée en la jugeant trop sophistiquée, doit se rétracter : Isa Miranda n’est pas qu’une silhouette glamour. Elle peut aussi porter la douleur du peuple, incarner une vérité nue.

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En 1960, Fellini fait appel à elle pour La Dolce Vita. Elle y incarne une comtesse vieillissante, silhouette mondaine un peu fanée, fantôme d’une autre époque. Ce rôle, presque un autoportrait involontaire, la transforme en allégorie : une star d’avant-guerre qui revient dans un cinéma nouveau, observée à distance. Dans cette apparition, Isa Miranda devient son propre double. Comme si elle jouait à la fois son rôle et sa légende telle la Gloria Swanson de Sunset Boulevard. Fellini lui offre une ultime lueur ; elle deviendra immortelle.


Isa Miranda savait jouer des apparences. Elsa Maxwell, la grande chroniqueuse mondaine, disait d’elle qu’elle pouvait transformer une simple robe noire en événement mondain rien qu’en entrant dans une pièce. Mais Miranda se méfiait du mot glamour : Si je veux être glamour, je mets un grand chapeau, je me tiens d’une certaine façon… mais ce glamour là est théâtral. On ne peut pas s’approcher. Le vrai charme, c’est la tendresse, la bonté, la capacité d’aimer les gens. Cette philosophie du charme la distinguait. Elle n’était pas seulement une diva distante, mais une femme cultivée, polyglotte. Elle parlait italien, français, anglais et allemand. Travailleuse acharnée, Isa apprenait parfois des dialogues entiers phonétiquement pour se fondre dans une langue étrangère.

Jusqu’à sa mort en 1982, Isa Miranda a conservé cette aura : mélange de grandeur et d’effacement, de mondanité et de mystère. Elle aura traversé trois mondes — le cinéma fasciste, Hollywood, le néo-réalisme italien — sans jamais appartenir vraiment à aucun.

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Hollywood la voulait copie, l’Italie la voulait docile, l’histoire l’a rangée dans l’ombre des Garbo, Dietrich ou Magnani. Mais c’est peut-être cette position bancale qui la rend fascinante aujourd’hui : Isa Miranda n’a pas été une « reine » du cinéma, mais une survivante, une silhouette fuyante, un fantôme magnifique et une actrice diaboliquement ensorcelante. Sa carrière est peut-être, tout compte fait une des plus éclectiques de toutes. Proche des grands maîtres italien comme de Sica et Fellini, elle tourne avec Gerard Philippe comme avec Franck Villard, avec Madeleine  et Bette Davis comme avec Barbara Bouchet et Marisa Mell. Si elle est dans un remake stupide de Caroline Chérie elle est aussi dans Portier de Nuit. Entre Paris Rome et Hollywood elle surgit à Londres et dans « Chapeau melon et Bottes de cuir » tant qu’à faire. Si elle tourne moins à partir du milieu des années 60, c’est que la télévision ne lui en laisse plus le temps pas plus qu’elle ne lui en laissera dans les années 70.

Isa Miranda fut si discrète avec un tel renom international que sa résistance aux potins tient de la gageure. A l’annonce officielle de son décès, le 8 juillet 1982 à Rome, nombreux furent ceux qui l’admiraient depuis des années et découvraient sidérés qu’elle était la veuve du réalisateur Alfredo Guarini.

Celine Colassin

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QUE VOIR ?

1933 : Il Caso Haller : Avec Marta Abba

1934 : La Signora di Tutti : Avec Marco Ferrari

1935 : Passaporto Rosso : Avec Marco Ferrari

1936 : Una donna tra due mondi : Avec Marco Ferrari et Assia Norris

1937 : L’homme de nulle part : Avec Pierre Blanchar et Ginette Leclerc

1937 : Le mensonge de Nina Petrovna : Avec Fernand Gravey

1937 : Scipione l'africano : Avec Annibale Ninchi

1939 : Hôtel Impérial : Avec Ray Milland

1940 : Adventure in Diamonds : Avec George Brent et John Loder

1942 : Malombra : Avec Irasema Dillian

1944 : Zaza : Avec Antonio Centa

1945 : Lo sbaglio di essere vivo : Avec Vittorio de Sica

1945 : La carne e l’anima : Avec Massimo Girotti et Marco Ferrari

1948 : L’Aventure commence Demain : Avec Raymond Rouleau et André Luguet

1949 : Patto col Diavolo : Avec Anne Vernon

1949 : Au-delà des Grilles : Avec Jean Gabin

1950 : La Ronde : Avec Gerard Philipe

1950 : Botta e Riposta

1951 : Cameriera bella presenza offresi... Avec Guiletta Masina

1952 : Les 7 Péchés Capitaux : Avec Paolo Stoppa

1952 : : Gli uomini non guardano il cielo : Avec Henri Vidon et Vittorio de Sica

1953 : Nous Les Femmes

1954 : Avant le Déluge : Avec Bernard Blier

1954 : Le Secret d’Hélène Marimon : Avec Frank Villard et Carla del Poggio

1954 : Raspoutine : Avec Pierre Brasseur et Renée Faure

1955 : Vacances à Venise : Avec Katharine Hepburn et Rossano Brazzi

1955 : Les Déroutés : Avec Lucia Bosé et Jean-Pierre Mocky

1957 : Une Manche et la Belle : Avec Mylène Demongeot et Henri Vidal

1959 : Le Secret du Chevalier d’Eon : Avec Andrée Debar

1963 : La Corruption : Avec Rosanna Schiaffino et Jacques Perrin

1963 : La Noia : Avec Bette Davis et Horst Bucholz

1964 : Hardi Pardaillan : Avec Valérie Lagrange, Gerard Barray et Philippe Lemaire

1964 : La Rolls Royce Jaune

1964 :  Einer frisst den anderen : Avec Jayne Mansfield et Cameron Mitchell

1964: Du You Know this Voice? Avec Dan Duryea

1966 : Un Monde Nouveau : Avec Madeleine Robinson et Christine Delaroche

1967 : L'Affaire du train postal Glasgow-Londres: Avec Horst Tappert

1968 : Caroline Chérie : Avec France Anglade et Bernard Blier

1968 : Les Souliers de Saint Pierre : Avec Anthony Quinn et Laurence Olivier

1970 : Colpo Rovente : Avec Barbara Bouchet

1971 : Marta : Avec Marisa Mell

1974 : Portier de Nuit : Avec Charlotte Rampling et Dirk Bogarde

1977 : La lunga strada senza polvere : Avec Colea Rautu

1987 : Apocalisse di un terremoto : Avec George Ardisson

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