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OTTAVIA PICCOLO


Depuis Gina Lollobrigida, le cinéma français s’entichait régulièrement d’actrices italiennes sur qui compter pour illuminer ses écrans et émoustiller le spectateur. La formule n’était pas idiote. Leur beauté fracassante remplissait largement sa part du contrat et leur talent n’était pas à remettre en cause. Mieux encore, leur tempérament fougueux, leurs gestes fiers et le verbe haut faisait bien plaisir aux femmes que l’après-guerre avait renvoyées à leurs fourneaux. Ni Gina Lollobrigida, si Sophia Loren après elle ni Antonella Lualdi ni Claudia Cardinale encore ensuite ne se laissent consumer par leur amour des hommes et moins encore dominer par un mari.

Ça fait bien plaisir à voir que ces maris remis à leur place, ces amants menés par le bout du nez et ces pères qui n’ont plus rien à dire.


Oui l’italienne à tout bon sur les écrans hexagonaux. A la fin des années 60, le cinéma dans la foulée de mai 68, de la libération sexuelle, le MLF et la commercialisation de la pilule contraceptive se cherche un avenir dans un cinéma libéré de toute morale bourgeoise. Comprenez : « Mesdames, retirez vos petites culottes ».  Pour quelques films qui piétineront quelques tabous, le cinéma des années 70 va surtout libérer pas mal de voyeurs et mettre tout autant de scénaristes au chômage.


L’Italie ayant eu bien plus de difficultés à se libérer des contraintes morales qui sont aussi des contraintes religieuses va se montrer riche en créatures de rêve légères et court vêtues faisant les délices de l’exportation.

C’est dans cette conjoncture bien particulière que le cinéma français déroulera ses tapis rouges sous les pieds mignons de Virna Lisi, Laura Antonelli, Ornella Muti, Dalila di Lazzaro et quelques autres petits « pousse au crime » légèrement vêtues et pas bégueules.


Ottavia Piccolo surgit à son tour et le cinéma français s’affole. On voit en elle une nouvelle petite panthère à déshabiller à l’écran et dans les pages des magazines des hommes modernes. Délicieusement gironde, pulpeuse et mutine, elle a tout pour plaire et satisfaire…Mais quelle maldonne.

Ottavia Piccolo n’est pas une pin-up à dénuder sur papier glacé.


Elle a été une enfant vedette en Italie. Elle était sur les planches à dix ans et faisait honneur aux classiques. Lorsqu’elle débute au cinéma ce n’est pas dans « Une infirmière pour trois trouffions ». C’est dans « Le Guépard » de Luchino Visconti entre Terrence Hill, Burt Lancaster et Alain Delon. Alain Delon qui sera plus sensible à Ottavia qu’à Claudia Cardinale. L’amitié entre ces deux-là sera pour plus tard. Avec Ottavia c’est tout de suite.

Mais n’anticipons pas.

Ottavia Piccolo vient au monde le 9 octobre 1949 à Bolzano dans le haut Adige.

Elle a 10 ans comme je l’ai dit lorsqu’elle monte sur scène. Elle en a 14 lorsqu’elle tourne « Le Guépard ». Un tournage difficile sous une canicule insensée et qui se heurte aux mafias locales. La jeune Ottavia, sanglée dans des corsets, étouffée sous ses crinolines souffre le martyre. Un martyre dont se contrefous Burt Lancaster mais qui va émouvoir Delon pour ce côté « bon petit soldat » qui meurt à la tâche.


A cet âge-là, on ne fait pas du cinéma tous les jours. Ottavia pourrait se ruer sur les propositions qui ne manquent pas mais elle préfère, quitte à se laisser oublier tout à fait, quitte à ne plus jamais tourner, attendre le bon scénario et le bon réalisateur.

Pour la ramener à l’écran, il faut Mauro Bolognini ou Pietro Germi.


En 1970, la France qui ignore encore tout d’elle la découvre au festival de Cannes où elle reçoit le grand prix d’interprétation pour « Metello ». C’est le deuxième film qu’elle tourne sous la direction de son mentor le très exigeant Mauro Bolognini, ce n’est pas le dernier.

Alain Delon qui se souvient du bon petit soldat en crinolines sur le plateau du Guépard, se souvient d’elle. Il lui fait savoir qu’il est fier d’elle, qu’il la félicite et dans la foulée la propose au casting de « La veuve Couderc ».

Le film est un succès, Ottavia affole les populaces dans son rôle de sauvageonne fille-mère et folle de son corps. Sa carrière en France est lancée, sa carrière italienne continue. Ottavia devient une vedette internationale sanctifiée par le festival de Cannes. Elle a 21 ans. Elle peut jouer les filles de 16 ans comme les femmes de 35. Elle peut jouer les anges, les mères et les salopes. Ottavia c’est une actrice. Une vraie, une grande à côté de laquelle on va un peu passer à cause de cette beauté affolante, naturelle et décomplexée.


Mais la parenthèse française sera courte. Démarrée sur les chapeaux de roues en 1970 avec le film de Pierre Granier Deferre, elle s’arrête en 1976 avec « Mado » de Claude Sautel. Si en 1970 elle avait un rôle secondaire dans l’ombre de Simone Signoret, en 1976, c’est Romy Schneider en personne qui a un rôle secondaire dans « Mado ». Mado, c’est Ottavia Piccolo. C’est elle qui tient le rôle-titre. Pas Romy Schneider.


Quant à l’omniprésent Alain Delon, il l’avait choisie pour être sa partenaire dans « Zorro ». Ottavia avait glissé du tournage avec Alain Delon à celui avec Romy Schneider.

La nouvelle sera donc d’autant plus surprenante. Ottavia Piccolo arrête tout.

Mariée le 11 décembre 1974 avec le journaliste Claudio Rossoni, Ottavia va devenir la maman d’un petit Nicola. Elle rentre en Italie. Définitivement. Si elle ne tourne plus pour le cinéma, elle fait beaucoup de télévision. On ne la reverra sur grand écran qu’en 1987.


Toujours très active à la télévision toujours mariée avec le même homme, le seul, Ottavia Piccolo est toujours une actrice active et sollicitée. Si elle est un peu oubliée en France, en Italie elle est toujours populaire ce qui fait mentir l’adage « Nul n’est prophète en son pays ».

Avoir partagé l’affiche avec Alain Delon et Romy Schneider suffirait déjà à positionner une actrice. Mais Ottavia Piccolo l’a aussi partagée avec Michel Piccoli, Robert Hossein, Vittorio Gassman, Orson Welles, Sharon Tate, Nino Manfredi, Burt Lancaster, Vittorio de Sica, Alida Valli, Jacques Perrin, François Périer, Jacques Dutronc ou Fanny Ardant. Je ne sais pas qui peut dire mieux ou aussi bien.

Celine Colassin.


QUE VOIR ?

1963 : Le guépard : Avec Claudia Cardinale, Burt Lancaster et Alain Delon

1966 : Le chevalier de Maupin : Avec Catherine Spaak et Robert Hossein

1968 : Faustina : Avec Vonetta McGee

1969 :12+1 : Avec Sharon Tate, Vittorio Gassman et Orson Welles

1970 : Metello : Avec Massimo Ranieri

1971 : Trastevere : Avec Rossana Schiaffino et Nino Manfredi

1971 : Un’anguilla da 300 milioni : Avec Senta Berger et Lino Toffolo

1971 : Bubu : Avec Massimo Ranieri

1971 : Un aller simple : Avec Nicoletta et Jean-Claude Bouillon

1971 : La veuve Couderc : Avec Alain Delon et Simone Signoret

1973 : L’histoire très bonne et très joyeuse de Colinot trousse-chemise : Avec Francis Huster

1974 : Antoine et Sébastien : Avec Jacques Dutronc et François Périer

1975 : Zorro : Avec Alain Delon

1976 : Mado : Avec Michel Piccoli

1987 : La famiglia : Avec Fanny Ardant et Vittorio Gassman

1987 : Da Grande : Avec Renato Pozzetto

1992 : Angeli a Sud : Avec Viviana Natale

1993 : Le long silence : Avec Carla Gravina et Jacques Perrin

1996 : Marciando nel buio : Avec Jean-Marc Barr et Franco Interlinghi

1999 : Karaoké : Court métrage avec Davide Bechini

2016 : 7 Minuti : Avec Ambra Angiolini et Clémence Poesy

2019 : Fogli di Carta : Court métrage avec Beatrice Bresolin

2021 : Welcome Venice : Avec Anna Bellato

 
 
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