
Je pourrais me contenter d’effleurer le destin de Xenia Desni en retraçant celui de sa merveilleuse fille Tamara Desni. Mais la belle vaut bien, elle aussi, un retour dans le temps et cette mise en lumière de sa vie.
Xenia vient au monde le 17 Janvier 1897 à Kiev, alors intégrée à l’empire Russe et qui ne redeviendra ukrainienne qu’après la révolution de 1917. Révolution qui aura bouleversé la vie de la jeune Xenia. Née dans la bourgeoisie très aisée, Xenia qui a manifesté très tôt des capacités artistiques évidentes et un enclin certain pour la danse est autorisée par sa famille à suivre les cours du très distingué opéra de Kiev. Elle n’a encore que 16 ans lorsqu’elle fait la rencontre d’un jeune noble lui aussi piqué des velléités artistiques qui fait d’elle madame James Brodsky et la maman d’une petite Tamara.

Nous sommes en 1913, dans quelques courts mois, le monde va basculer à jamais pour la jeune Xenia comme pour tous ses compatriotes. Il n’est jamais bon, lorsque gronde la révolution de faire partie de la caste des nantis contre lesquels se sacralisent toutes les haines et se déclenchent touts les violences. Brodsky va réussir à fuir les fureurs bolchéviques vers Hollywood (on ne sait jamais!) mais dans sa précipitation, il laisse derrière lui femme et enfant.
Xenia devra fuir seule avec sa petite fille sous le bras. Elle fuira jusqu’à Constantinople où elle survivra tant bien que mal en devenant une attraction de cabarets. Elle n’est pas la seule beauté slave exilée, et elle n’est certainement pas une denrée rare et exotique comme elle l’aurait été encore six mois plus tôt. A Constantinople comme ailleurs, on n’a que faire des princesses blanches en exil. Il y en a tant! Xénia quittera la Turquie pour gagner l’Allemagne, et plus précisément Berlin qui, la paix revenue semble connaître une soif de vivre et une effervescence artistique et culturelle sans pareille. Xenia la très belle, débarque dans la ville de tous les possibles et trouve des engagements dans des revues « jazzy » bien meilleures et d’un autre niveau que ce qu’elle avait bien pu trouver à Constantinople.

Très vite elle sera remarquée pour son allure et sa grande beauté parfaitement dans les nouveaux canons de son temps. Les premières propositions de films, inévitablement, arrivent. Elle débutera dans l’ombre d’une immigrée polonaise, une certaine Pola Negri et sera déjà sacrée vedette en 1922. Elle sera durant toutes les années vingt une icône des écrans teutons et ceux qui se souviennent bien d’elle n’hésitent pas à clamer haut et fort qu’elle fut pour beaucoup dans les inspirations Dietrichiennes première époque.
Rien ne semble plus devoir assombrir le destin de Xenia Desni dont les années noires sont à jamais derrière elle. Rien si ce n’est l’invention du micro! Cette machine infernale eut pour sa carrière l’effet d’une guillotine.
Mais en cette fin des années 20, sa fille Tamara est à son tour devenue une jeune fille fantastiquement belle et Xenia qui adore sa fille va abandonner sa carrière sans aucun remord pour se concentrer sur celle de sa fille et devenir son très habile manager. Elle réussira à faire de Tamara une star chantante et dansante adorée du public allemand avant que l’Angleterre à son tour ne fasse d’elle une de ses reines des écrans. On vivra donc dans l’opulence à Londres après avoir vécu dans le luxe à Berlin.

Les deux femmes resteront toujours fusionnellement proches l’une de l’autre. Lorsqu’à son tour la carrière de Tamara donnera des signes de faiblesse et qu’elle-même se lassera du cinéma, se préférant restauratrice à succès à Grasse, dans le midi. Xenia fera toujours partie de la famille. Inséparable de sa fille Tamara et du cinquième mari de celle-ci. Ainsi bien entendu que de ses deux petites filles adorées.
Xenia s’éteint le 27 Juin 1962 à l’âge de 65 ans et repose sous le ciel du midi à Roquefort les Bains, tout près de Grasse où elle fut, enfin, tant heureuse.
Celine Colassin.

QUE VOIR?
1921: Pariserinne: Avec Ressel Orla
1923: Graf Cohn: Avec Hermann Vallentin
1925: Die Braut Gefundene: Avec André Mattoni et Jenny Jugo
1926: Schützneliesel: Avec Mittz Zwerenz et Livio Pavanelli
1927: Ein Mädchen Beim Rheinisches Rheinischen Wein: Avec Jack Trevor
1940: Kriminalkommissar Eyck: Avec Annelise Uhlig