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EVELYN NESBIT

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Au milieu des années 50, la 20th Century Fox cherchait un nouveau véhicule pour sa star fétiche, Marilyn Monroe. Dans les archives du scandale américain, un nom resurgit : Evelyn Nesbit. La première “It Girl” de l’histoire, muse de peintres, modèle de Gibson Girls, amante d’un millionnaire, et héroïne malgré elle du premier procès pour meurtre “médiatique” du XXe siècle. Un scénario fut donc écrit — Marilyn le lut, fit une moue, et le lança à la figure de tout le monde. Joan Collins, jeune et ambitieuse, le ramassa aussitôt avec l’énergie d’une débutante prête à tout, et devint “La Fille sur la Balançoire”. La vénérable Evelyn Nesbit, survivante de ses propres mythes, fut engagée comme conseillère technique — initiative louable mais sans effet : le film fit un four magistral avant de sombrer dans l’oubli le plus complet.


Avant d’être recyclée par Hollywood en “conseillère technique”, Evelyn Nesbit avait été bien plus qu’un fait divers.

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C’est le jour de Noël 1884 à Tarentum, près de Pittsburg en Pennsylvanie que Florence Evelyn Nesbit vagit en ce monde pour la première foi. Le nourrisson était d’une beauté frappante. L’enfant la jeune fille, la femme le resteront. Etrangement, la belle enfant est très tranquille, presque placide, assez timide très tranquille et assez timide. Elle a quelque chose d’une poupée de salon que l’on pose et qui reste là jusqu’à ce qu’on la change de place. Elle aura un jeune frère, Howard sans que ça ne la bouleverse outre mesure.

La famille Nesbit déménage à Pittsburgh en 1893. Evelyn encore écolière change d’école avec toute sa désinvolture. Son père, Winfield Scott Nesbit, est un homme de loi qui connaît quelques difficultés sur le plan financier. Il meurt cette année-là, laissant derrière lui des dettes importantes. Sa veuve et leurs deux enfants se retrouvent sans le sou.


À quinze ans à peine, elle pose pour Charles Dana Gibson, James Carroll Beckwith, et le sculpteur Frederick MacMonnies, qui voient en elle l’incarnation d’une Amérique moderne, élégante et audacieuse. Sa mère, veuve pragmatique, la promenait de studio en studio, entre moralité victorienne et nécessité financière. Evelyn, elle, séduisait sans calcul : elle avait la grâce du chat qu’on regarde trop.

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Et puis il y eut Stanford White — l’architecte du Madison Square Garden, dandy flamboyant, mécène, libertin à sa façon. Il fit aménager pour elle un appartement secret sur la 24e rue, garni d’un balançoire suspendue au milieu d’un salon et capitonnée de velours rouge — symbole devenu immortel. C’est là qu’Evelyn, encore mineure, fut initiée à la volupté par un homme de trois fois son âge. White la couvrit de cadeaux, de robes et de bijoux. Pour un temps, elle fut son chef-d’œuvre.


Jusqu’à ce que surgisse Harry K. Thaw, héritier de Pittsburgh, psychotique mondain, follement épris d’elle, obsédé par la “pureté” qu’elle avait perdue. Il la courtisa, la harcela, la supplia d’avouer. Evelyn finit par céder : elle raconta la “nuit sur la balançoire”. Ce fut la fissure dans le cristal.Un an plus tard, le 25 juin 1906, au Madison Square Garden — ironie absolue — Thaw aperçut White à une table voisine, en pleine première mondaine. Il se leva, sortit un revolver, et tira trois balles en plein visage de l’architecte, devant des centaines d’invités en robe longue et gants blancs. On dit que la musique de l’orchestre continua de jouer quelques secondes avant que le silence ne tombe.

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Le lendemain, les journaux hurlèrent : “The Girl on the Red Velvet Swing”, “The Beauty, the Beast, and the Architect”. Le procès devint un cirque, le premier procès “spectacle” de l’histoire américaine. Evelyn, à vingt et un ans, fut traînée de la barre au confessionnal : on lui demanda de décrire la chambre rouge, le vin, les baisers. La foule se pressait devant le tribunal comme à Broadway. Thaw plaida la folie passagère et fut acquitté. Evelyn, ruinée et compromise, se retrouva libre mais marquée à vie.


Hollywood, flairant le parfum du scandale, tenta bien sûr de l’enrôler. Evelyn y fit un passage aussi bref que muet — au sens propre : quelques apparitions dans des films de série tournés entre 1914 et 1916, où sa beauté fatiguée peinait à rivaliser avec celle des nouvelles idoles de l’écran. Elle y jouait des femmes bafouées, héroïnes tragiques d’un monde qui se délectait de sa propre chute. L’expérience tourna court : le public n’aimait pas les fantômes.


La carrière post scandale d'Evelyn Nesbit ne connut qu'un succès modéré, qu'il s'agisse de théâtre, de cinéma ou de gérante de café. Bientôt la presse ne l’évoque plus qu’à l’occasion de ses tentatives de suicide. En 1916, elle épouse son cavalier dans ses spectacles de danse, Jack Clifford  Il la quitte en 1918, et elle divorça de lui en 1933.

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Elle vit dans l’anonymat pendant plusieurs années à Northfield, dans le New Jersey Elle réussit épisodiquement à se libérer  de l'alcoolisme, de son addiction à la morphine Pendant ses dernières années, elle enseigne la céramique.

Elle mourut dans une maison de retraite en Californie, le 17 janvier 1967 âgée de 82 ans fraîchement fêtés 20 jours plus tôt.

Joan Collins endossa avec ravissement les froufrous d’Evelyn, chevaucha sa balançoire et se vautra dans un four d’envergure qui découragea la Fox d’en faire son Elizabeth Taylor maison.

Celine Colassin

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QUE VOIR ?

1914 : Threads of Destiny. Avec Bernard Siegel

1916: A Lucky Leap: Avec Belle Bennett

1917: Redemption: Avec Russell Thaw

1918: Her Mistake: Avec Eugène Strong

1922: The Hidden Woman: Avec Crauford Kent et Ruth Darling

 

 
 

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