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SILVANA PAMPANINI



Très oubliée aujourd’hui, très injustement oubliée, Silvana Pampanini fut plus qu’une actrice populaire ou une grande vedette du cinéma italien. Elle fut plus qu’une star internationale.

Elle fut un phénomène de société. Elle fut plus qu’adorée elle fut adulée. Et puis surtout elle fit naître un type, un personnage qui perdure aujourd’hui.

 

Silvana fut la première « Bella Ragazza » du cinéma italien. Elle fut la première Ciocciara avant toutes les autres qui tireront leur gloire souvent plus prestigieuse encore du personnage crée par Silvana Pampanini. Gina Lollobrigida, Sophia Loren et jusqu’à Monica Bellucci lui doivent tout.

 Avant Silvana, il n’existait dans le cinéma italien que deux types de beauté féminine : la blonde et délicate jeune première, romantique à souhait souvent nigaude, toujours romanesque et facilement larmoyante. Et puis il y a la « grande dame », étalonnant ses charmes, ses diamants et ses intrigues sur l’échelle sociale allant de la petite bourgeoisie de province à la plus haute noblesse.


Et Silvana vint.


Pour la première fois une italienne affolait les populations en chaloupant pieds nus dans des robes à deux sous. Fière de ses courbes et de sa culture populaire voire de son ignorance et peut être même de son innocente vulgarité. La presse parlera bientôt d’elle comme « la femme qui inventa la poitrine-choc ». Pour la première fois la sensualité voire la sexualité se faisait voire et entendre depuis les rues basses de Naples. S’il n’y avait pas eu Silvana Pampanini il n’y aurait pas eu « Pain Amour et fantaisie », il n’y aurait pas eu « L’Or de Naples », il n’y aurait pas eu « La Ciocciara ». C’est sous les trais affolants jusqu’à l’insolence de Silvana Pampanini que l’on vit pour la première fois une fille du peuple se fichant des honneurs et des décorations puisque la nature lui avait donné tout ce dont une femme pouvait rêver quand précisément elle n’avait rien. Un physique de déesse au sang bouillant.

Silvana et celles qui la suivront sur le même chemin ne sont en quête que d’une chose : l’amour qui passe par le sexe et non l’ambition avec pour toute arme pour l’obtenir en sus du physique qui convient : Toute la gloire et la fierté d’être le plus beau fruit de l’Italie et de son peuple.

 

Avant Silvana une femme trop belle était soit victime de sa beauté soit elle s‘en servait comme d’une arme. Avec Silvana, un corps tel que le sien sert à aimer et à être aimée. Bien sûr, elle est parfois un peu victime des hommes, parfois elle les manipule bien un peu. Pour bonne mesure donner. Il faut bien que les films aient des scénarii et que quelque chose s’y passe. Mais là n’est pas l’essentiel.

L’essentiel c’est cette flamboyante plastique et ces sens charnels aux aguets. La belle est aussi attentive à l’appel de l’amour que l’araignée au vol du moucheron distrait. Le plus étonnant sans doute étant que contrairement à une Sophia Loren née dans les faubourgs napolitains les plus démunis, Silvana Pampanini qui allait être la quintessence de la beauté du peuple sans culture venait d’un milieu plutôt aisé et très cultivé.



Silvana Pampanini vient au monde à Rome le 25 septembre 1925 dans une famille très bourgeoise comme on l’a vu. La sœur de son père n’est autre que la grande cantatrice Rosetta Pampanini. Cette soprano aussi glorieuse que tapageuse, grande experte des œuvres de Puccini fut une enfant prodige. Voyant sa nièce complètement fascinée par son art et son train de vie, Rosetta se pique de lui faire suivre ses prestigieuses traces et lui donne des leçons particulières et très assidues de chant lyrique.

 Art où hélas joliesse, fascination et bonne volonté ne suffisent pas.

« L’enfant n’a pas d’organe » mais au moins elle chantera juste et pourra même faire un peu illusion sur des morceaux plus accessibles que « Madame Butterfly » qui fut pour Rosetta Pampanini ce sera « Tosca » pour Maria Callas.

 Aujourd’hui on entend de plus en plus qu’il n’y a aucun lien de parenté entre l’actrice et la cantatrice. Pourtant dans une interview accordée à ciné-miroir en 1952, Silvana Pampanini évoque elle-même cet apprentissage du chant opératique tel que je l’ai décrit. Je me contenterai donc de cette version même si au fond l’un n’empêche pas l’autre, Silvana ayant pu très bien être l’élève de Rosetta sans lien de parenté.

 Quoi qu’il en soit, et selon Silvana elle-même, son illustre maître de chant aurait laissé tomber dans un soupir navré « Pas de voix ! » qui l’avait profondément meurtrie et sur le coup, rougir jusqu’aux oreilles.

 Silvana continua donc une scolarité des plus classiques si ce n’est qu’elle l’agrémenta de cours de chant. Après tout il n’y a pas que le répertoire de la scala dans la vie.


Née en 1925, Silvana a 15 ans lorsque la guerre éclate.

 Elle en a 20 lorsqu’elle se termine et si elle n’en a pas trop souffert personnellement, en tout cas pas plus que le reste de l’Italie. Elle a gardé sa maison et ses deux parents en vie. Mais elle s’est renfermée sur elle même et souffre d’une timidité quasi maladive.

 Une timidité qui chez une femme d’une telle beauté confine au ridicule.

C’est ce qu’a dû penser son professeur de chant qui l’a inscrite au concours de miss Italie, le premier d’après guerre.

 

C’est là que commencera la fulgurance du phénomène Silvana Pampanini. Dès que les premières photos des candidates au titre furent révélées, le public s’enticha de Silvana.

 Le soir du concours une foule incroyable était là. On sifflait, hurlait, applaudissait, trépignait à chacune de ses apparitions. Lorsque le nom de la lauréate fut proclamé, celui de la pauvre Rossana Martini ce fut une marée d’indignation, de huées, une révolte voire une révolution. La pauvre miss Italie 1946 fut jetée à bas de son trône par une foule déchaînée portant Silvana en triomphe en scandant son nom.



La pauvre Rossana Martini n’était peut-être pas moins belle mais elle avait choisi de se présenter sous des attitudes fières voire hautaines qu’elle avait dû piocher dans l’album photo de Greta Garbo ou de Joan Crawford ! L’Italie libérée n’avait plus besoin de chichiteuses sophistiquées comme on les aimait du temps de Mussolini et son cinéma de grandes dames.

On voulait renouer avec une Italie de soleil de chair et de plaisir, on voulait Silvana.

 

En quelques heures, elle était devenue la nouvelle reine d’Italie la reine de l’avenir et des lendemains qui chantent. Comment le cinéma ne se précipiterait il pas sur une telle aubaine ?

 Jamais une actrice n’avait encore profité d’une telle publicité ! Quel cinéaste résisterait à une actrice déjà célèbre à payer comme une petite débutante sans métier ?

 Silvana sans doute grisée par une telle victoire venue d’un pays tout entier et non d’un jury accepta volontiers.

Surtout si on lui promettait de pouvoir chanter dans ses films.

 

On lui aurait promis la lune et même une Cadillac ! Alors une chansonnette ! Pourquoi pas ? Avec plaisir, même ! Si elle savait chanter elle était par contre tout à fait incapable de dire un texte. Mais qu’importait ? On la doublerait par un quelconque laideron à voix suave du conservatoire !

 

Décider Silvana fut facile ! Par contre décider son père ce fut une autre paire de bretelles.

 Ce brave homme changera d’avis lorsqu’il estimera sa fille mal employée et surtout mal payée.

Il abandonnera alors son propre métier pour devenir l’agent de sa fille. La maman de Silvana sera sa fidèle secrétaire et son attachée de presse. Chez les Pampanini on allait aborder la gloire en famille. Silvana la « bombe à la poitrine choc » vivra toujours avec papa et maman.

 

Quant au concours de miss Italie, après le phénomène Silvana en 1946, dès l’année suivante ce sera devenu le must de l’année, l’évènement culturel à ne rater sous aucun prétexte. Et surtout si on est producteur de cinéma. Ces messieurs se livreront une lutte sans merci pour « signer » les belles de l’année. Ils ne seront pas déçus parce qu’en 1947 Gina Lollobrigida, Gianna Maria Canale, Eleonora Rossi Drago et Lucia Bose la lauréate livreront une âpre bataille pour le titre le plus convoité du pays. A ce moment là, loin de ces échauffourées en petite tenue, Silvana est déjà une vedette. Elle tourne son deuxième film et sa photo n’a plus quitté la une des magazines. Portée en triomphe en 1946, célèbre en 1947, vedette en 1948 elle est une star en 1949 et numéro un en 1950 !

 

Le public en est fout et il n’est pas le seul. Toto, véritable monument national s’en est entiché jusqu’au délire et la veut dans tous ses films ! Silvana est ravie ! Qui n’adorerait pas être adorée par Toto ! On voit tant ces deux –là ensemble qu’une partie du public est persuadée qu’ils forment un couple dans la vie. Silvana, déjà fidèle à sa ligne de conduite ne confirme ni ne dément, elle ne commente pas. Cette attitude permettra à la presse de lui attribuer toute une kyrielle de fiancés, de flirts et d’amoureux qu’elle n’a en général jamais rencontrés de sa vie !



 On ne saura jamais si Toto et Silvana s’aimèrent, on n’en sait guère plus à propos de ses autres liaisons prétendument tapageuses alors que rien n’est moins sûr que leur existence. Le roi Farouk étant entre autres, de ceux à qui la presse accorda la félicité des amours Pampaniniennes !


Son image personnelle est d’ailleurs assez ambigüe.

 

Dans les films tout est clair ! Silvana follement décolletée est l’objet de toutes les mâles convoitises dans d’amusantes comédies parfois chantantes parfois un peu truculentes parfois les deux ! A la fin, même si elle incarnait une demoiselle à la vertu aussi légère que son porte-monnaie vide, elle part quand même filer le parfait amour avec le plus bel acteur de toute la mâle distribution. A la ville aussi, elle porte tout ce que la décence autorise en ses extrêmes limites pour affoler la populace éblouie. Mais on la voit essentiellement avec papa, avec maman ou avec son sapin de Noël.

A peine s’il existe quelques images de Silvana un peu pompette et clope au bec dans un festival quelconque. Quant aux confidences risquées : bernique !

Silvana s’en tient à si peu de choses dans ses interviews qu’elle aurait pu se taire tout à fait.

 

-Le film qu’elle a tourné, le film qu’elle va tourner, ses partenaires merveilleux, la mode, ses prochaines vacances, son papa, sa maman, sa nouvelle voiture.

Et la voilà épuisée de s’être tant révélée.

Jamais elle n’en avait tant dit !

 

Elle est même si discrète qu’elle ne fait aucun commentaire sur la pluie de rivales qu’on lui oppose en quelques mois. Gina Lollobrigida, Sophia Loren, Gianna Maria Canale, Lucia Bose, Eleonora Rossi Drago, Silvana Mangano pour ne citer que les plus voyantes !


Silvana n’a rien à en dire, elle est trop occupée avec son film.

En 1951, on ira jusqu’à glisser la jeune Sophia Loren dans son lit pour « La Traite des Blanches ».  Peine perdue, la bellissima Silvana n’a rien à en dire ou en tout cas n’en a rien dit.

Pour encore brouiller les pistes, parfois, quand même, la diva se plaint. Elle se plaint d’être cantonnée à la comédie alors qu’elle sent bouillir en elle le tempérament d’une grande tragédienne ! Quand on est numéro un au box office, toute suggestion mérite qu’on s’y intéresse.

Proposer à Silvana Pampanini un sombre drame pour lequel on aurait plutôt songé à Yvonne Sanson ou Anna Magnani signifie il que la reine de la vente des billets de cinéma va dire « OUI »? Qui, une fois de plus, refuserait une aubaine pareille ? C’est paradoxalement le cinéma français qui va profiter de cet engouement pour le sombre drame et faire appel à Silvana pour venir un peu souffrir sur les écrans de l’autre côté des Dolomites.

 

Il y a des années que les magazines de cinéma abreuvent le public des photos de Silvana, pourquoi ne se ruerait-il pas pour la voir en technicolor sur ses écrans préférés ? C’est comme cela que la belle Silvana installera ses charmes dans « La Tour de Nesle » d’Abel Gance. Malheureusement pour la belle, le public italien n’est guère convaincu par ses exploits dramatiques et la préfère décidément dans la comédie joyeuse truffée de chansonnettes. Nouveau paradoxe pour cette star adoptée par la France qui la rebaptise « Nini Pampan » mais ne fait guère honneur à ses films. Silvana n’a pas à rougir de son talent dramatique mais sans doute ce physique par trop solaire convient –il mal à l’emploi? Je l’ignore.

Le public ne la plébiscite ni en victime ni en garce.



Le plus étrange étant sans doute qu’elle est la seule actrice italienne de sa génération à devoir rester cantonnée dans un type de rôle pour garder l’intérêt de son public. Le sort de ses rivales est diamétralement opposé puisqu’on n’aime rien tant que de voir Gina et Sophia passer de la comédie au drame et même de voir Anna Magnani faire rire !

 

Et puis soudain, il y a la cassure. Claire, nette précise et sans bavure. Sans bavure et sans raisons apparentes.

Nous sommes en 1956. Silvana Pampanini a tourné quatre films en 1955.

Quatre succès.

L’année suivant elle n’en tourne que deux.

Deux échecs.

En 1957 son seul film est un nouvel échec.

 

La mécanique céleste qui la liait d’amour avec son public s’est enrayée. En France Gina Lollobrigida lui a clairement damé le pion dans le rôle de « La belle italienne du cinéma français ». Après « Fanfan la Tulipe » et « Belles de Nuit », son triomphe en Esméralda dans « Notre Dame de Paris » la sacre à tout jamais. Ses rivales nationales rompues à incarner de nombreux types de rôles ne se font pas prier pour se ruer à Hollywood et auréoler leurs carrières du prestige américain. Et pourquoi pas leur cheminée d’un Oscar?

 Or, Silvana a toujours refusé les ponts d’or d’Hollywood…Par paresse d’apprendre l’anglais.

Elle était doublée en France, elle était doublée dans sa propre langue dans son propre pays. Si l’Amérique ne voulait pas s’adapter à sa méthode, que l’Amérique aille se faire voir.

Ce qu’elle fit .


 Sans doute pour la seule fois de sa carrière, Silvana excédée s’exprima et plutôt vertement.

« Aujourd’hui pour qu’une actrice travaille en Italie il faut qu’elle ait un producteur dans sa manche et quand je dis sa manche je parle de son lit ! La Loren, la Magnani, la Mangano, la Massina, c’est leur mari qui les font travailler ! Moi je n’ai personne pour me défendre à part mon papa ! Quand leurs maris en auront marre de les voir sur l’écran ou dans leur lit, on ne parlera plus d’elles !»


 Ce en quoi elle se trompait, se gardant bien de préciser qu’en France non plus on ne la faisait plus tourner et que sa principale rivale Gina Lollobrigida n’était l’épouse d’aucun producteur influent. Gina était représentée par son mari comme Silvana l’était par son père et l’un n’était pas inférieur à l’autre au moment des négociations. 

 Sans doute Silvana Pampanini ne pouvait elle ou ne voulait elle pas voir que tout simplement les temps changeaient.


Que désormais son attirail de vamp souvent bon marché passait de mode et avec lui le genre de films où elle avait tant brillé. La belle mettra longtemps à reconnaître que c’est finalement en Italie qu’elle était la moins « superstar », elle se grisait de ses succès en Amérique latine, au japon et le succès de ses films étrangement projetés en URSS.


Elle ne déteste pas montrer à ses invités sa collection de « souvenirs ». Des bijoux sensationnels pour la plupart : Ceux offerts par Perón, Castro, Trujillo, du président du Venezuela ou de l’empereur de Chine. Et même ceux envoyés très officiellement par le Kremlin !

Mais malgré ce florilège de témoignages admiratifs, le temps a entamé sa marche inexorable.

Bientôt la nouvelle vague viendra en France jusqu’à abolir le souvenir de la belle Nini Pampan ! En Italie, l’actrice toujours célèbre et toujours populaire ne rend pas les armes.

Elle ne détèle pas !

Elle tourne, espérant le succès, le triomphe qui lui rendra la place qu’elle mérite, la place qui est la sienne car c’est le public, en dépit de tous les avis professionnels qui a fait d’elle une star en 1946.



 C’est peut-être là le drame de Silvana Pampanini. C’est le public qui l’a portée à bout de bras jusqu’au sommet. Peut-elle admettre, peut-elle seulement comprendre que dix ans plus tard presque jour pour jour il la délasse, l‘abandonne et s’en désintéresse ?

Si elle n’a pas tout à fait raison lorsqu’elle incrimine les actrices mariées aux plus puissants des producteurs qui a ses yeux prennent tous les rôles, elle n’a pas tout à fait tort non plus. Il y a de la place pour bien du monde dans le cinéma transalpin qui fait plus souvent qu’à son tour appel à des actrices étrangères pour ses génériques.

Elle va littéralement batailler pour conserver sa gloire et son statut.

Chassée de son trône de grande vedette internationale en 1956, elle va livrer bataille bec et ongles mais en vain pour s’y asseoir à nouveau jusqu’en 1967.

Cette année là elle déclare forfait car ses parents maintenant très âgés ont besoin d’elle à leurs côtés. Elle compte s’occuper d’eux comme eux-mêmes se sont occupés d’elle sa vie durant. Elle part comme si elle était encore l’immense star de 1950 qui se retirait au faîte de la gloire comme une Garbo. Elle n’évoque pas cette dernière décennie de rôles indignes dans de mauvais films comme si elle, elle les avait aimés et y avait cru comme en des chefs d’œuvres ignorés. Elle n’évoque pas non plus ce cinéma italien moribond qui s’éteint avec elle et n’est déjà plus que l’ombre de ses cendres.

Lassé d’un cinéma qui s’est cherché des cautions intellectuelles chez Antonioni, le public populaire s’est retranché derrière ses écrans de télévision. Silvana n’y apparaîtra qu’une seule fois. Un triomphe.

« J’ai accepté pour faire plaisir au public mais je ne ferai plus de télévision, c’était exceptionnel, je ne suis pas poussée par la nécessité de gagner ma vie pour en faire ! »

 

On tourne moins, on tourne mal. Le péplum, la comédie napolitaine, tout ça s’est démodé. Cinecitta accueille les dernières grandes productions américaines. Dont elle n’est pas puisqu’elle avait refusé d’en être. L ’Amérique n’est guère oublieuse avec les Italiennes un peu trop effrontées. Le cinéma italien, le cinéma de Nini Pampan est mort avec sa carrière. Il est entré en agonie et ne fait plus alors que se perpétrer à l’aide de vagues béquilles faites d’érotisme et de violence pour espérer vendre encore quelques ultimes billets à des nigauds boutonneux.

 1967 ! Dans deux ans ce sera Woodstock. Qu’irait faire Silvana Pampanini à Woodstock avec ses guêpières, ses jarretelles, ses diamants et ses gants d’opéra ?

Et puis il y a autre chose à mettre en ligne de compte. Silvana avait, enfin, rencontré le grand amour.


Au milieu des années 50, Silvana est une star adulée en Amérique latine. Elle voit tous les tramways de Buenos-Aires afficher des banderoles à son nom lorsqu’elle arrive en ville (elle les ramènera comme souvenirs en Italie). Mais c’est en Uruguay qu’elle est la plus phénoménalement adorée. Et le gouverneur de Montevideo, espérant sans doute la convaincre de s’installer au pays comme Ava Gardner en Espagne lui offre un ranch superbe et des hectares de terrain à ne pas savoir les compter. Silvana entre officiellement en possession de son immense propriété mais prise par le tourbillon de sa carrière, elle n’y mettra les pieds qu’en 1960 !



Revenue en Uruguay pour le festival de Punta del Este, elle retrouve ses nombreux amis et parmi eux le très élégant Martino de la Vela. Issu d’une des plus illustres familles nationales.

Ce don juan de 37 ans n’a jamais caché son admiration énamourée pour la star.

Mais cette année-là, elle découvre avec stupeur que le fameux ranch qui lui a été offert en 1955 est voisin du sien. C’est donc en qualité de cicérone qu’il escorte Silvana visiter ses lieux.

Eblouie de sa propriété qui est d’une magnificence qu’elle n’imaginait pas, elle est plus éblouie encore par celle de son voisin. Martino de la Vela possède, certes des puits de pétrole à ne savoir qu’en faire mais il possède surtout tellement de terres qu’elles débordent en Argentine, au Brésil et même au Paraguay.


En 1962, Silvana annonce son mariage.

Un mariage qui ne se fera pas.

 

 Silvana tournera une ultime sottise pour faire plaisir à je ne sais qui en 1971 puis elle entrera en anonymat comme d’autres entrent en religion. 

En 1999 on la verra dans un téléfilm parce qu'elle était restée curieuse.

Silvana Pampanini ne s’est jamais mariée, n’a jamais eu d’enfant et n’a tourné aucun chef d’œuvre impérissable qui puisse perpétrer son nom, sa légende et son souvenir.

 Elle n’aura même pas été exaucée en ce qui concerne ses vœux pieux à l’intention de ses rivales. La mort seule aura séparé Sophia Loren, Silvana Mangano et Guiletta Masina de leurs mentors. S’est-elle consolée lorsque la carrière de Gina Lollobrigida s’est estompée à son tour en 1968 par faute d’un cinéma qui « ne lui correspondait plus » ? Je l’ignore.

Même ses disques qu’elle avait enregistrés et qui s’étaient en leur temps vendus comme des petits pains n’ont pas été réédités pour l’érudition des générations suivantes.

 

Silvana Pampanini est la star d’un passé un peu plus mort que les autres.

Devenue très âgée, l’actrice qui n’avait guère tenté de faire survivre sa beauté de légende oubliée fit quelques réapparitions, méconnaissable avec ses 80 ans largement dépassés.

Silvana Pampanini s’est éteinte le 6 janvier 2016. Elle avait 90 ans.

 

La presse unanime la fêta une ultime fois, vantant sa beauté, son talent, sa carrière et…la fabuleuse époque du cinéma qu’elle symbolisait à elle seule aux yeux de l’Italie toute entière.



 


 QUE VOIR ?

 


1947 : L’Apocalisse : Les débuts de Silvana face au beau Massimo Serato.


 1948 : Il Barone Carlo Mazza : marivaudage musical où un baron désargenté tente d’épouser une riche américaine qui se révèle être une fieffée croqueuse de diamants.

 

1950 : L'inafferrabile 12 (Mon Frère a peur des Femmes) : Une joyeuse comédie avec Walter Chiari en vedette même s’il faut bien reconnaître que la plastique de Silvana Pampanini fut pour beaucoup dans l’intérêt du public…Et de la promotion du film !

 

1951 : Tizio, Caio, Sempronio : Une comédie typique des années 50 comme il en pleuvait alors sur l’Italie. un film sans autre ambition que de faire rire avec un humour un peu potache saupoudré de jolies filles de passage.

 

1951 : Bellezze in Bicicletta : Joyeuse comédie encore. Cette fois Silvana Pampanini est secondée dans ses oeuvres par la blonde Delia Scala. Le film fut un énorme succès commercial et Silvana commenta « Bien sûr que c’est un succès ! C’est fait pour ! Il y a tout dedans ! Du soleil des chansons du sport de la drôlerie et des belles filles ! »

 

1951 : OK Néron : Comédie péplumesque comme l’Italien en raffole au début des années 50 avec Walter Chiari et Carlo Campanini qui croient voyager dans le temps et rencontrent Gino Cervi en Néron et Silvana en Poppée


1951 : Una Bruna Indiavolata : Les mésaventures du pauvre Ugo Tognazzi, épicier qui n’est jamais sorti de sa province et qui part à l’assaut de Rome après avoir gagné une grosse somme au jeu. Pactole qu’on lui vole immédiatement ! Silvana reçut d’excellentes critiques mais l’une d’elles, mi figue mi raisin pouvait se lire comme un présage : Ugo Tognazzi et Silvana Pampanini sont formidables. Quel bonheur de retrouver l’actrice dans l’emploi où elle excelle et où nous l’adorons. Souhaitons que l’éclatante réussite du film l’encourage à garder son emploi et l’éloigne du sombre drame qu’elle semble tant affectionner. (j’ignore à quel sombre drame ce critique faisait allusion)

 

1951 : Io Sono il Capataz : Silvana dans une aventure de Pancho Villa ! Et qui voit-on se faufiler dans la distribution ? Ne serait-ce pas une débutante aux dents longues qui ne va plus tarder à devenir Sophia Loren ?

 

1951 : La Paura fa 90 : Une histoire burlesque menée par Ugo Tognazzi avec une Silvana plus affolante que jamais !

 

1951 : Antonio di Padova : Voici Silvana parachutée dans un biopic consacré à St Antoine de Padoue. Fort étrangement la superstar du glamour italien joue la mère du saint.

 

1952 : La Tratta delle Bianche. Celle fois c’est avec la belle Eleonora Rossi Drago et sous la direction de Luigi Comencini que Silvana partage l’affiche. On verra également passer Sophia Loren !

 

1952 : La Donna che invento l’Amore : Silvana est donc la femme qui invente l’amour en 1910…Avec Rossano Brazzi comme matériel de base !

 

1952 : La Presidentessa : Le scénario tiré du roman éponyme avait déjà été porté à l’écran en 1938, il le sera encore en 1977 mais c’est incontestablement cette version de Pietro Germi qui mérite de rester dans l’histoire.

 

1952 : Le Avventure di Mandrin : On ne présente plus Mandrin qui cette fois a l’intéressante apparence de Raf Vallone. Comme a son habitude, Jacques Castelot excelle dans son rôle de fourbe noble !

 

1952 : Processo Alla Città : Silvana et Amedeo Nazzari dirigés par Luigi Zampa. Le sujet du film, initialisé par Franceso Rosi était pour le moins risqué. A l’époque la censure était toute puissante en Italie. Non qu’elle se passionne pour la profondeur des décolletés des actrices mais pour les sujets traités dans leurs films. Celui-ci où Silvana professe dans une maison close revient sur une affaire de meurtre liée à la camorra napolitaine.

 

1953 : Canzoni, Canzoni, Canzoni : Une Silvana aux charmes froufroutants domine avec Alberto Sordi une distribution prestigieuse puisqu’outre Antonella Lualdi et Franco Interlinghi, on verra passer Marina Vlady et Cosetta Greco

 

1953 : Bufere : Silvana face à un Jean Gabin alors dans le creux de la vague.

 

1953 : Königsmarck : Revoici une énième version de la chose, la troisième si je ne m’abuse. Cette fois avec Jean-Pierre Aumont et Renée Faure.

 

1953 : L’Incantevole Nemica : Une année très francophile pour Silvana Pampanini puisqu’après Gabin et Jean-Pierre Aumont, la voici aux prises avec Robert Lamoureux !

 

1954 : La Principessa del Canarie : Film d’aventures pou le moins épiques où Marcello Mastroianni alias don Diego est sauvé des griffes d’un puma par la belle Silvana durant la conquête des îles Canaries par l’Espagne. En remerciement il débarrassera la belle de son encombrant mari Gustavo Rojo d’un coup de boulet de canon bien placé !

 

1954 : Un Giorno in Pretura : Silvana croise la route de Sophia Loren pour la troisième fois. Mais cette fois, le rôle de celle-ci a gagné en importance. Elle n’est plus l’affolante pouliche un tantinet vulgaire de 1951. Son rôle lui permet à la fois de jouer de ses charmes et de faire preuve d’un brin d’autorité.

 

1954 : Amore di Mezzo Secolo : Film à sketches où Silvana joue le sien avec Alberto Sordi.

 

1954 : La Schiava del Peccato (L’Esclave du péché) : Silvana retrouve Marcello Mastroianni. Mais cette fois, point d’aventures échevelées, de gaudrioles en tout genre, Silvana s’adonne enfin au drame au grand désarroi de ses admirateurs.

 

1954 : Orient Express : Silvana complète sa collection de partenaires français avec Henri Vidal.

 

1955 : La Tour de Nesle : Silvana en Marguerite de Bourgogne pour Abel Gance.

 

1955 : La Bella di Roma : Silvana retrouve son cher Alberto Sordi sous la direction de Luigi Comencini

 

1956 : La Loi des Rues : Silvana tourne en France pour Ralph Habib face à Raymond Pellegrin. Le vent tourne en Italie et ce n’est hélas pas ce film qui redorera son blason international. D’ailleurs l’actrice retiendra surtout du tournage sa rencontre avec Louis de Funès !

 

1957 : Saranno Uomini : Film de gangsters à l’italienne avec Massimo Girotti.


 1961 : Il Terrore dei Mari : Film de pirates sans grandes surprises si ce n’est une affiche pour le moins racoleuse sans grand rapport avec l’action du film !

 

1964 : Il Gaucho : Comédie avec Vittorio Gassman dans le rôle titre

 

1964 : Napoleoncito : Silvana Pampanini égarée dans le cinéma mexicain le temps d’un film !

 

1971 : Mazzabubù... quante corna stanno quaggiù? L’ultime apparition de Silvana Pampanini au cinéma.

 

 

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